À Bamako, le lit du fleuve se rétrécit

Avr 16, 2022 - 20:00
Avr 16, 2022 - 13:43
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À Bamako, le lit du fleuve se rétrécit
Baisse de la pluviométrie, rétrécissement de son lit, le fleuve Niger dans sa partie malienne est fortement touché par les effets du changement climatique. - Maliweb.net -À Bamako, le lit du fleuve Niger, surnommé le Djoliba, se rétrécit drastiquement, donnant l’impression qu’il est possible d’en faire la traversée à pied. Les espaces laissés par le retrait de l’eau sont occupés par des maraîchers qui cultivent des légumes comme le gombo, la tomate ou encore la salade. Un triste spectacle pour le troisième cours d’eau le plus long d’Afrique (4 200 km dont 1 700 au Mali), après le Nil (6500 km) et le Congo (4700 km). « Il y a moins d’eau aujourd’hui dans le fleuve Niger à Bamako qu’il y a 10 ans à la même période » confirme Diallo Kadiatou Sy, cheffe du département Protection et gestion des écosystèmes à l’Agence du bassin du fleuve Niger (ABFN), une structure gouvernementale malienne. Elle s’inquiète des conséquences du changement climatique sur le fleuve. Le volume d’eau qui s’est écoulé à la station de Koulikoro, située légèrement en aval de Bamako, a baissé de 43% entre 2014 et 2017, passant de 13,40 à 7,23 millions de m3, selon la direction nationale de l’hydraulique (DNH), un service du ministère des Mines, de l’énergie et de l’eau. En 2017, le tarissement a été causé par « un arrêt précoce des pluies sur les hauts bassins du Niger et du Sankarani, caractérisé par des niveaux d’étiages relativement bas », indique un document de la DNH. « Entre la période avant 1970 et celle jusqu’à aujourd’hui, il y a un déficit pluviométrique annuel de l’ordre de 20 à 50%, soit 50 à 500 mm par an », rapporte au téléphone Dr. Djibrilla Maïga, point focal de l’Autorité du bassin du Niger (ABN) au Mali, à ne pas confondre avec l’ABFN. L’ABN est une structure inter-étatique chargée de promouvoir la coopération entre les pays membres parcourus par le Niger et d’assurer un développement intégré de son bassin. Ce manque de pluies touche les régions sahéliennes, mais également désormais des régions plus humides au sud. « Un profond déséquilibre écologique » Cette forte baisse a entraîné des difficultés dans la gestion des eaux du fleuve par la Commission de gestion des eaux de la retenue de Sélingué et du barrage de Markala (CGESM). Se réunissant une fois par mois, elle doit arbitrer l’allocation des ressources en eau entre les usagers situés en aval des deux barrages. « Le bassin du Niger subit ainsi depuis quarante ans un profond déséquilibre écologique, engendré par les effets conjugués du changement climatique mais aussi de la poussée démographique », estime Diallo Kadiatou Sy. Résultat : la population de la capitale Bamako, plus de 3 millions en 2019, ne cesse d’augmenter, nourrie par l’exode rural, de jeunes principalement. Prenant sa source en Guinée, avant de poursuivre sa route en Sierra Leone, au Mali, au Niger, au Bénin, avant de se jeter dans l’océan Atlantique au Nigeria, « le fleuve Niger est sauvé par la bonne pluviométrie provenant du haut bassin guinéen », selon Dr. Djibrilla Maïga. Il arrive ainsi parfois qu’il y ait à l’inverse trop d’eau. En juillet 2018, le niveau dans le Sarakarani, un affluent du Niger situé en amont de Bamako, a atteint une hauteur inattendue de 4,7 m. « Cet amorçage précoce du Sankarani a occasionné d’importants apports au niveau de la retenue de Sélingué », souligne une note de la direction nationale de l’hydraulique, ce qui a poussé les autorités à procéder à un déversement des eaux du barrage de Sélingué dès le mois d’août afin d’éviter une crue. Pour Dr. Djibrilla Maïga, l’atténuation et l’adaptation aux effets du changement climatique passent par la construction de barrages et la plantation d’arbres. « Si les habitants ne peuvent se passer de la coupe des arbres, il va falloir avoir une politique très agressive de reboisement et de revégétalisation de notre espace », insiste-il. Le spécialiste préconise aussi la construction de forages dans les champs pour pallier le manque de pluie devenu chronique. Abdrahamane SISSOKO/Maliweb.net

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