Aboubacar Kanté, «le handicapé battant» derrière la star du reggae Tiken Jah Fakoly
![Aboubacar Kanté, «le handicapé battant» derrière la star du reggae Tiken Jah Fakoly](uploads/news/images/2019/06/Tiken-Jah-Fakoly.jpg)
«Dans la société ivoirienne, on ne croit pas aux potentialités des handicapés. Et cette marginalisation commence depuis la famille, depuis le bas âge. Il y a des parents qui rechignent à scolariser un enfant handicapé, parce qu’ils voient cela comme un investissement inutile. Ils se disent que même s’il réussit ses études, au final, il n’aura pas de boulot», explique à Sputnik Aboubacar Kanté.
![Aboubacar Kanté, directeur du label de Tiken Jah Fakoly Aboubacar Kanté, directeur du label de Tiken Jah Fakoly](https://cdnfr1.img.sputniknews.com/images//104132/16/1041321666.jpg)
«Quand mon beau-père a commencé à avoir ses propres enfants avec ma mère, je sentais que moi, je n’étais plus désirable. À tel point que ma mère a dû faire de petits commerces pour me scolariser, car cela lui tenait beaucoup à cœur. Pendant que mon beau-père s’occupait très bien de ses enfants», affirme Aboubacar. Vivant de plus en plus mal cette situation, il finit par fuguer de la maison à l’âge de 14 ans. Et arrête de ce fait l’école en classe de CM2.
«Ma mère a vraiment galéré pour s’occuper de moi. Je me sentais responsable de toutes les galères qu’elle endurait dans son foyer à cause de moi. Je me suis dit que si je pars, ce serait le mieux pour elle et pour moi aussi», explique-t-il.
«Comme tout le monde le sait, sous nos cieux, vidangeur, c’est un métier très sale et dégradant, il n’était pas question que j’y passe ma vie», confie Aboubacar Kanté. Avec ses économies, il ouvre un kiosque de restauration rapide. Il exerce cette activité durant trois ans. Les affaires ne marchent pas comme il le souhaite. En 2003, il vend le kiosque dans l’intention d’aller s’installer au Burkina voisin, pour un nouveau départ. Cette même année, le passionné de musique qu’il est réalise sa première maquette. Depuis 1996, il compose des chansons. La musique un exutoire et un moyen d’expression face aux «déboires de son existence». En partance pour le Burkina, il fait une escale à Bouaké où il apprend que sa sœur cadette, qui souffre d’une maladie inconnue, vient de perdre l’usage de ses deux jambes. Il engage progressivement toutes ses économies dans ses soins. Son projet de nouveau départ tombe à l’eau et il se retrouve «finalement coincé» à Bouaké, ville qui est alors depuis 2002 le fief de la rébellion dirigée par Guillaume Soro et qui le restera jusqu’à la fin de la crise postélectorale de 2010-2011. En 2007, dans la foulée de la cérémonie de la Flamme de la Paix, censée marquer l’arrêt des hostilités entre forces rebelles et forces loyalistes, il est sélectionné par la télévision nationale ivoirienne pour représenter Bouaké à Tempo, une célèbre émission musicale, exceptionnellement organisée dans la ville.
«J’ai très vite acquis de l’expérience. J’ai fini par devenir moi-même un entrepreneur en créant mon entreprise de construction.» En 2017, il crée donc BSC International. Outre l’immeuble qui abrite le label de Tiken Jah Fakoly, l’entreprise a notamment réalisé pour la star du reggae un site touristique au Mali et une école primaire à Sokoro, un village de la Guinée. Pour la gestion de son label et ses réalisations immobilières, le reggaeman ivoirien de 50 ans fait confiance à Aboubacar Kanté, qui n’est autre que son neveu, le fils de sa défunte sœur aînée.
«Si Fakol [pseudonyme d’Aboubacar, ndlr] est là, ce n’est pas parce qu’il est mon neveu, des neveux, j’en ai plein. S’il est là, c’est parce qu’il m’a prouvé sa valeur et m’a fourni les résultats que j’escomptais», a l’habitude de déclarer Tiken Jah Fakoly.
«Il y a de nombreux handicapés qui refusent de se résigner, qui ont entrepris des activités pour s’en sortir et qui ont besoin d’un coup de main. Ils ont de la volonté, des idées, mais pas de moyens. L’ONG est censée leur apporter un soutien. Aujourd’hui, par la grâce de Dieu, je suis dans une position où je suis entouré d’hommes compétents et de confiance qui peuvent m’accompagner dans ce projet», conclut Aboubacar Kanté.
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