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Att en mars, Cmd neuf mois plus tard : Kati, décidément s’accommode mal de nos légendes vivantes. Il est vrai qu’on ne descend du piédestal de la popularité qu’à son corps défendant. La seule différence entre nos deux exemples, au-delà des positions occupées, est qu’Att a été déposé à quelques mois de sa retraite politique et que Cheick Modibo Diarra, lui, débutait. Il n’est peut-être pas « fini » si les urnes lui donnent dans quelques mois ou années ce que la mitraillette lui a refusé mardi matin. Mais son très jeune parti constitué justement en 2011 pour le porter au pouvoir ne pèse pas lourd, même après les neuf mois de magistère de l’homme.
Devoir d’ingratitude ? Et au pouvoir, le prestigieux scientifique dont on pouvait questionner la légitimité technique et morale pour l’exercice qui lui avait été confié, aura laissé une grande part de son aura et de ses préjugés favorables. Sa conception du statut de Premier de pleins pouvoirs mentionné dans l’Accord-cadre qui avait pour lui valeur biblique a pu réduire ses dispositions au compromis avec une classe politique qu’il n’était cependant pas le seul à vouloir exclure. De surcroît, ses alliances, son discours et sa pratique ont été vite perçus comme celle d’un revanchard. Kati à qui il devait son poste ne tarde pas à critiquer ses « méthodes » et lui disait à qui voulait l’entendre que ses protecteurs ne voyaient en lui que le trésorier payeur de leurs « rentes ». Avec le président par intérim, s’estompera aussi l’idylle du début qui l’avait fait se porter au chevet du « tonton » agressé le 21 mai et pleurer publiquement à Paris à l’évocation des tristes événements. Si l’un et l’autre évitaient d’en causer, leur désamour culminant était désormais un secret de polichinelle. Une des explications de ces crispations au sommet est à rechercher dans la source de la légitimité du président par intérim et du Premier ministre de pleins pouvoirs.
Trop de fronts en même temps. Pour ce dernier, même quand il obtint un avis contraire de la Cour constitutionnelle dont la publication à temps aurait peut être changé les regards, Dioncounda Traoré était « périmé » après quarante jours de service. Mais là encore, Cheick Modibo Diarra n’était pas le seul. Reste que celui-ci, clashant constamment avec Kati, a plus d’une fois téléscopé avec le Président auquel il a remis sa démission mardi après-midi. Les circonstances de sa démission ont été critiquées par le Quai d’Orsay, Bruxelles et New-York. La Maison Blanche qui détacherait volontiers Kati de la carte du Mali sera entendue, nul ne doit avoir de doute là-dessus. D’autres communiqués indignés et inquiets sont à attendre. Mais ils n’iront probablement pas jusqu’à qualifier de putsch les événements du lundi, le Premier ministre sortant n’étant pas une résultante de la constitution mais d’un Accord-cadre dont plusieurs chancelleries se gaussent. Toutefois, le Capitaine Sanogo s’invite sous les feux de l’actualité et les tirs croisés de la communauté internationale.
Test de cohérence et tolérance zéro. Il arborait de plus en plus le boubou blanc de sa nouvelle légitimité. Il devra maintenant une fois de plus solliciter son gilet pare-balles devant l’artillerie lourde de l’orthodoxie républicaine. Y compris sa filiale malienne. Ibrahim Boubacar Kéita est parmi les premiers à s’exprimer, « regrettant » les circonstances de la démission du Dr Diarra avant d’insister sur la nomination d’un « Premier ministre consensuel, un homme compétent ». Bon test de cohérence locale que le cas Cmd donc. Quoi qu’il arrive, une chose est sûre : le Mali a épuisé son droit à l’erreur. De Paris à Washington, d’Abuja à Addis-Abeba, la surveillance sera désormais plus accrue sur notre gouvernance. Car, nous sommes devenus comme dit Dioncounda Traoré « un enjeu de sécurité globale ». Et nous le sommes devenus non pas en raison de la crise du Nord mais parce que la crise du Nord résulte d’abord de la crise de gouvernance du Sud.
Adam Thiam