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Mme Chantal/Ami[/caption]
C'est en 2005 que j'ai découvert l'Afrique noire et, tout, particulièrement le Mali.
J'ai commencé à fréquenter la communauté malienne dès mon retour. Un an après, en 2006, j'ai rencontré mon mari, Moussa. Depuis lors, je vais régulièrement au Mali (à Bamako et au village), j'ai acquis la nationalité malienne et je participe (+ ou - selon les « évolutions » de ses acteurs) à la vie politique malienne, ici et là-bas. Bref, mon cœur balance entre la France et le Mali et dès que je le pourrai, j'aimerais vivre six mois de chaque côté.... Donc, je connais un peu la situation du Mali.
Je comprends les positions de principe adoptées par la « gauche de la gauche » (Front de Gauche, EELV, NPA, etc.) et les associations luttant contre la « Françafrique ». Je comprends leurs réactions épidermiques et leur inquiétude... Mais...
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Mais les tenants de la « gauche de la gauche » n'auraient-ils pas été beaucoup plus inquiets, voire atterrés, si les terroristes, narcotrafiquants, « bandits armés » (comme les Maliens les appellent) et autres barbus agités (qui n'ont rien à voir avec l'islam !) avaient poursuivi leur route depuis Konna vers Sévaré, Mopti et... pris Bamako ainsi que la totalité du Mali ?
Il y avait réellement une situation d'urgence vitale pour le Mali. Sans l'intervention française, le Mali serait passé sous la coupe de ces soi-disant « islamistes » mafieux. C'est la raison pour laquelle l'ensemble de la communauté malienne en France et une très grande majorité des Maliens restés au pays applaudissent des deux mains l'attitude de la France.
Les « donneurs de leçons » (qu'ils soient « verts », Front de Gauche,…) doivent se garder d'adopter une attitude aussi néo-colonialiste que celle qu'ils prétendent dénoncer. Ils ne doivent pas estimer qu'ils ont raison et que les Maliens ne comprennent rien. Les Maliens sont pragmatiques et guidés par le principe de réalité.
Quand un homme qui s'agrippe à une falaise à pic voit une main se tendre vers lui pour lui sauver la vie, que doit-il faire en premier lieu ? Doit-il se dire «
mais qu'est-ce qu'il me veut ? » » ou «
en veut-il à mon portefeuille ? » » ; ou doit-il, d'abord, saisir la main tendue pour remonter sur la falaise ? Vu comme ça, la réponse est aisée : si l'homme en danger refuse la main tendue, il va mourir ; et s'il meurt, il perdra son portefeuille et ne pourra plus rien ni pour sa famille ni pour son pays.... Donc il commence par saisir la main et il voit après. S'il voit que son « sauveur » en veut à son portefeuille ou profite de lui pour atteindre sa famille, alors rien n'interdit au « sauvé » de s'en prendre à son « sauveur ».
A mon sens, la non-intervention française aurait pu être assimilée à de la « non-assistance à pays en danger ». C'est pourquoi l'intervention française est applaudie par pratiquement tous les Maliens, y compris par des doyens qui ont mené la lutte pour l'indépendance aux côtés de Modibo Kéïta.
Car l'urgence, c'est de repousser puis d'éradiquer ces forces obscurantistes (qui menacent non seulement le Mali mais aussi, par ricochet, le reste du monde). Sinon, quelle liberté de choix, quelle démocratie pourrait bien avoir le peuple malien ?
L'intervention française n'est pas la condition suffisante au retour à la démocratie au Mali mais elle est une condition nécessaire à cette étape. Il faut que le Mali retrouve son intégrité territoriale pour que le peuple malien puisse décider librement de son avenir.
Et, ensuite, l'intégrité territoriale du Mali est une condition nécessaire mais pas suffisante : si c'est pour revenir à la situation qui prévalait au Mali avant le « coup d'Etat » (il n'y avait plus vraiment d'Etat…) du 22 mars dernier, le peuple malien ne serait pas encore réellement « "sorti de l'auberge ».
Les progressistes maliens doivent, parallèlement au combat de reconquête du territoire, réfléchir aux conditions de reconstruction démocratique de leur pays. Ils doivent impérativement s'interroger sur les responsabilités de leurs gouvernements successifs et la faillite de leurs forces politiques. La France a une responsabilité directe et indirecte (au Sahel, en Lybie, etc.) dans le départ du « feu » qu’elle est allée éteindre aujourd'hui.
Mais le président ATT (arrivé au pouvoir par le biais d'élections truquées par la France !) et la quasi totalité des forces politiques maliennes qui faisaient consensus autour de lui (par intérêt) étaient complices de la France et d'autres puissances occidentales (américaines par exemple). C'est cette complicité qui a permis aux « bandits armés » de s'installer et progresser.
L'intervention française au Mali était, hélas, déjà bien réelle depuis l'indépendance de ce pays (sauf sous la présidence de Modibo Kéïta de 1960 à 1968). Mais avant le 10 janvier 2013, elle prenait d'autres voies, plus sournoises (quel président africain francophone est-il parvenu ou resté au pouvoir sans l'aval de la France ?).
Ici, maintenant (17 janvier 2013), nous ne devons pas condamner mais nous devons appeler à la vigilance des deux côtés.
D'une part, le « sauvé » ne doit pas entretenir de rapports ambigus avec son « sauveur » : il ne lui doit aucune reconnaissance éternelle ! Les Maliens devront être vigilants. Cela nécessitera que les citoyens maliens reconstruisent de nouvelles forces progressistes dignes de ce nom avec des pratiques démocratiques et des dirigeants intègres, faisant passer le Mali avant leurs «
ego » (ce qui manque cruellement pour l'instant !).
Mais, d'autre part, le « sauveur » ne doit rien attendre ni exiger de celui qu'il a « sauvé ». C'est sur ce point là que les forces progressistes françaises devront porter leur vigilance pour exiger du gouvernement français qu'il mette réellement fin à la « Françafrique » au Mali, y compris dans ses aspects « sou(s-)terrains » (c'est le sous-sol malien qui attire de nombreux appétits !...) et pour qu'il entretienne, enfin, des rapports égalitaires avec le Mali.
Au-delà, nous devons amener nos gouvernants à respecter l’Afrique, les peuples africains, les richesses de leurs sous-sols et de leurs cultures. Les peuples africains ont droit au respect. Ils doivent décider, seuls, de la maîtrise de ces richesses et de leur propre destin. Les peuples africains ont beaucoup à apprendre aux occidentaux, y compris en matière de conception du monde et même de démocratie (cf. la Charte de Kurunkan Fuga édictée dans l’empire du Mali au XIIIème siècle). Il est fort possible que le XXIème siècle soit le siècle de l'Afrique et de ses lumières….
Voilà quelques premiers éléments de réflexion. J'espère ne pas avoir été trop longue !... Mais la situation est tellement complexe et il y a tant à dire….
Bon courage à tou-te-s celles et ceux qui, en France et au Mali, participeront par leur réflexion et leur action à la renaissance du grand Mali démocratique (héritier de la charte de Kurukan Fuga !) que nous appelons tou-te-s de nos vœux.
Chantal/Ami – « US-RDA Association » - Montreuil (France) / Guiffi (Mali) – 17/01/2013
(Pour Maliweb.net)