Comme chaque année, la période des corrections des épreuves de l’examen du baccalauréat mobilise surtout l’attention des enseignants ayant les qualités requises. Mais pour d’autres aussi, ne répondant pas à la norme, l’occasion est trop belle. C’est le cas des épreuves de philosophie dont la correction, dans les académies, surtout à Bamako, n’a pas été sans louvoiement, sans tension. Au point que dans un centre, peu s’en est fallu qu’on en vienne aux mains. Quid ?
[caption id="attachment_83743" align="alignleft" width="300"]
![](http://www.maliweb.net/wp-content/news/images/2012/08/ouane-CMJN.jpg)
M Ouane, ministre de l'Education[/caption]
La correction des épreuves a pris fin, et l’heure est maintenant à l’attente des résultats qui seront naturellement bons pour les uns, mauvais pour les autres. En cette correction, les années se suivent et se ressemblent presque, en considération de l’étalage insolent d’un problème que l’on croyait promis à la disparition, mais qui, au grand embarras de tout le monde, se renforce. Il ne peut s’agir que du grave problème que pose le profil des correcteurs qui, au constat général, n’est pas soumis à des contrôles nets. Résultat : n’importe qui se paye le luxe de passer pour correcteur en n’importe quelle discipline, faisant ainsi des élèves une espèce d’agneau du sacrifice.
« Chaque année, les gens font des écrits sur nous, prétendant que nous sommes laxistes », a confié à titre d’entrée en matière un inspecteur le jour de sa prise de contact avec les correcteurs. Avant d’ajouter que cette année, ils (les inspecteurs) prendront les mesures nécessaires pour ne pas échouer dans les crocs de leur contempteur. L’étrange dans l’affaire, c’est que dans ce même centre, il s’avère qu’un étudiant en Deug 2 à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako, s’est placé comme correcteur des épreuves de philosophie. Pire, cet étudiant dans sa mégalomanie se plait à battre une campagne musclée autour de sa personne dans leur quartier, en disant à qui veut le croire qu’il détient une maîtrise en philosophie, alors qu’il n’en est rien. La preuve patente en est que, lors des corrections, à chaque fois que les enseignants en philosophie essayent d’agiter les idées, il demeure lèvres closes, promène son regard de rapace sur les bouches en gestation. Et comment se fait-il que les inspecteurs n’en sont pas au courant ? Il est donc remarquable que même si contrôle il y a eu, ça n’a été qu’une parodie.
Aussi, dans l’académie de la rive gauche, un vieux roublard, économiste de formations, promoteur du lycée privé Baya Diakité de Sénou, corrigeait en philosophie. Son téléphone n’arrêtait pas de sonner, et lorsqu’injonction fut donnée de mettre les téléphones sous silencieux, il a prétendu qu’il a des coups de fil importants à recevoir, donc a refusé. Et lorsqu’un enseignant a insisté en lui indiquant qu’il serait aimable qu’il l’éteigne, il a répondu :
« si tu répète ça, je te rentre dedans tout de suite ! » Séance tenante, ce dernier s’est mis debout pour lui montrer de quel bois il se chauffe. Dans la foulée, un autre enseignant lui a balancé à la figure qu’il se permet d’insulter les gens, alors qu’il n’est même pas habilité à corriger en philosophie. Crâne, il a fait savoir qu’il a quatre doctorats dont un en philosophie, qu’on lui a signifié d’amener le lendemain. Le jour suivant, il ne s’est pas présenté. Le comble, c’est que ce vieux se déchargeait sur le professeur qui enseigne philo dans son piètre lycée, et qui, idiot de haute classe, corrigeait son enveloppe et dans le même temps l’enveloppe du vieux indigne d’une once d’estime.
De plus, le proviseur du lycée et le directeur d’Etudes de l’Institut Supérieur de Formation et de Gestion d’Entreprise Mama Koné de kalaban-coro ont aussi eu leur masque de philosophe enlevé, mais ont continué tout de même à corriger sur autorisation de l’inspecteur, bien qu’ils soient juristes de formations. Or, pour la petite, l’inspecteur Soli Koné en retraite aujourd’hui, en son temps, a l’habitude de débusquer des psychopédagogues, des sociologues pour les renvoyer comme cela se doit.
Nous ne sommes pas sans savoir que toutes les autres disciplines souffrent du même problème dont les candidats sont seuls à faire les frais. Et on imagine sans mal que de cette façon, la banalisation se légitime, tout se formalise. En clair, toute personne qui aspire au bon sens ne peut manquer d’éprouver une colère forte, au constat que la correction ne se fait pas dans les règles de l’art. Et à qui la faute ? Bien entendu, les inspecteurs sont de prime abord, les premiers à être mis sur le banc des accusés. Ce sont eux qui doivent veiller à ce que la correction n’accuse pas un sabotage de cette sorte, au seul motif d’assouvir le désir effréné des individus à la morale souillée de faire de l’argent. Quand même bien qu’il reste évident que, dans le monde scolaire, la course à l’argent a pris une proportion monstrueuse. Partant, l’obligation s’impose de rappeler les inspecteurs à la décence. Car Comment comprendre que des juristes corrigent en philosophie, alors que des profs en la matière sont mis à l’écart ? Que les choses soient claires, ces prétendus juristes n’ont pas plus de niveau en philosophie qu’un petit élève de la terminale.
Alors donc, il faut en appeler aussi aux autorités scolaires à plus de rigueur dans le choix des correcteurs, singulièrement en philosophie, pour circoncire cette espèce de fléau qui est entrain d’avorter des possibles savants de demain. Pour ce faire, il est raisonnable que désormais chaque correcteur soit accompagné.
BOUBACAR SANGARE