Contestations populaires au Sénégal : L'opposition et la société civile prêtes à empêcher le vote d'une loi très controversée

Juin 22, 2011 - 18:30
Juin 22, 2011 - 18:30
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Déçus, les Sénégalais le sont du président Abdoulaye Wade qui accumule les erreurs, ces derniers temps, parce qu'obnubilé par son plan de dévolution monarchique pour installer son fils Karim Wade au pouvoir. Porté à la tête du Sénégal par une large coalition de partis politiques, pour assurer l'alternance, après trente ans d'opposition, Abdoulaye Wade se trouve aujourd'hui au cœur d'une fronde politico-sociale, suite au dépôt à l'Assemblée nationale de son projet de réforme du processus électoral instituant un ticket de président et vic- président, en plus  d'une élection à un seul tour avec le quart bloquant.

Les responsables de l'opposition arrêtés puis relâchés après des brimades et intimidations, le député-maire de Saint-Louis, Cheikh Bamba Dièye, qui se fait enchaîner aux grilles de l'Assemblée nationale, telles sont les tristes images du Sénégal qui sont en train de faire le tour du monde et qui n'honorent pas du tout ce pays qui était cité comme un des rares ilots de démocratie en Afrique.

En d'autres termes, avec Abdoulaye Wade, le mythe d'un Sénégal modèle de démocratie est en train de s'effondrer de jour en jour. La situation est vraiment explosive au Sénégal, au point que des partis politiques et organisations de la société civile en arrivent à demander que l'armée prenne le pouvoir pour éviter un éventuel bain de sang. En effet, des communiqués diffusés dans les journaux de la place appellent les officiers de l'armée à assumer leurs responsabilités pour éviter une guerre civile qui se précise de plus en plus.

Le projet de loi déposé par Abdoulaye Wade sur les tables des députés, qui devrait en principe être voté aujourd'hui, est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase du mécontentement généralisé. En effet, en proposant une élection présidentielle à un seul tour, où avec le quart seulement des électeurs on peut devenir président de la République du Sénégal, disons avec le vote de seulement 800 000 personnes sur une population de plus de 14 millions d'habitants, Abdoulaye Wade, élu en 2007 avec un score de plus de 60%, sent la terre se dérober sous ses pieds au point de chercher à sauver sa tête et celle de son fils, en tripotant de façon si maladroite le processus électoral de son pays.

En plus, Wade propose que le vote se fasse sur un ticket composé à la fois du président et du vice-président. A ce niveau, les regards se sont naturellement tournés vers son fils à qui l'actuel président du Sénégal cherche à ouvrir le chemin pour l'installer au pouvoir. Des manœuvres quotidiennes renvoient à ce plan monarchique qui risque de perdre Wade et son pouvoir s'ils s'entêtent dans cette voie.

De toute façon, ce projet de loi, ajouté au déficit d'énergie électrique qui plonge des pans entiers du pays dans le noir, sans compter les nombreux scandales financiers qui éclaboussent le président et son entourage, les expropriations, les difficultés de vie quotidienne marquées par des pénuries récurrentes et les frasques des proches du pouvoir, ont fini de révolter les Sénégalais. Depuis avant-hier, les organisations de la société civile ont rejoint le plus grand regroupement de partis d'opposition, "Bénnoo Siggil Sénégal " pour mener des actions concertées en vue de faire céder le président Wade plus que jamais engagé dans un processus de répression qui n'augure rien de bon.

Rappelons que les " Saltigués " ces oracles détenteurs d'un pouvoir mystique traditionnel, ont annoncé lors de leur séance annuelle de prédication, que le Sénégal, en 2012, tombera entre les mains des militaires, suite à de graves affrontements et incidents politiques. Est-ce pour cette raison que la société et l'opposition appellent déjà l'armée à prendre le pouvoir si l'on sait que les Sénégalais, dans leur majorité, croient dur comme fer à ces prédictions qui se réalisent à 80%?

En tout cas, la journée d'aujourd'hui est celle de tous les dangers, surtout si la majorité mécanique du parti de Wade, acquise à la suite d'un boycott des législatives de 2007 par l'opposition, applique un mot d'ordre irréfléchi en votant pour cette réforme qui sonnerait malheureusement comme le déclenchement de graves troubles.

Amadou Bamba NIANG

 

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