CPI : la justice internationale fragilisée après l’acquittement de Laurent Gbagbo
Instrumentalisation politique et amateurisme
Dans ses échecs répétés, on retrouve les mêmes causes, devenues systémiques : un mélange d’instrumentalisation politique et d’amateurisme, une notion parfois bien relative de l’intégrité et surtout l’absence de vision claire des responsables de la CPI, qui se donnent une ambition qui dépasse leur mandat. Ils veulent construire la paix – affaire de diplomates – quand on leur demande de rendre justice. A l’arrivée, ils échouent sur les deux tableaux. Depuis les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo, la justice internationale a toujours fait l’objet de tentatives d’instrumentalisation. Mais la CPI s’y est volontiers prêtée à travers le choix de ses cibles, des pays vacillant entre guerre et paix, souvent en marge d’un conflit électoral. En conséquence, elle subit des pressions politiques, plus ou moins subtiles, d’Etats qui ne coopèrent que lorsque la Cour rencontre leurs intérêts, ou, à tout le moins, ne les menace pas. Ce fut le cas de la France et de la Côte d’Ivoire, dans le cas de Laurent Gbagbo. Des Etats-Unis et du Royaume-Uni dans celui d’Uhuru Kenyatta et William Ruto, en lice pour la campagne présidentielle kényane lors de leur mise en accusation. Dans l’affaire Bemba, les Etats-Unis, la RDC et l’Europe ont fait pression au nom de la stabilité. La Cour et son procureur ont un problème : ils n’ont pas de forces de police. Ils ont besoin de la coopération des Etats pour leurs enquêtes. Celle-ci est néanmoins à géométrie variable. Les Etats ne sont vertueux que si leurs ressortissants ou leurs alliés ne sont pas visés, sinon tous les moyens sont bons pour espérer échapper à la Cour. Dans cette épreuve de force inévitable, c’est la Cour qui, par sa politique pénale bancale, fournit les armes de ses défaites successives. Persuadée d’obtenir la coopération des Etats en acceptant de se soumettre, elle n’utilise que rarement les pouvoirs réels dont elle dispose. L’élection d’un nouveau procureur en 2021 doit être l’occasion pour la CPI de les reconquérir.Quelle est votre réaction ?