Crise au Mali : La France et le MNLA, mythes et réalité

Juin 4, 2013 - 02:44
Juin 4, 2013 - 02:55
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Le souvenir de l’OCRS, ce réagencement colonial ultime et éphémère, réalité en 1957, et qui ne dura que jusqu’en 1962, de l’Organisation commune des régions sahariennes regroupant plusieurs régions sahariennes, est aujourd’hui oublié des responsables politiques français. Mais, il reste présent à Bamako, alimentant la suspicion autour d’un supposé agenda caché de la France pour, alternativement, mettre main basse sur les richesses du sous-sol saharien ou alimenter les rébellions touarègues.

  MNLAAujourd’hui encore, la représentation de la position française sur la question du Nord-Mali reste polluée par ces fariboles.   Ainis en est-il de la question des liens de la France avec le MNLA. Contrairement à une vision répandue à Bamako, il n’y a pas de collusion ni encore moins de collaboration entre la France et le MNLA.  

Lors de leur audition devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat (le 28 novembre 2012), il a été clairement dit aux représentants de ce mouvement qu’il convenait de déposer les armes, de se placer sur le seul terrain politique et de renoncer à des revendications mettant en cause l’intégrité territoriale du Mali, principe intangible consacré par le droit international. Lors de l’audition, il a été suggéré de rechercher une solution politique, autour d’une plate-forme pouvant réunir non seulement les communautés touarègues mais aussi les autres populations du Nord (majoritaires). Cela a été clairement affirmé : la lutte armée est une impasse. Il faut y renoncer. Ces exigences recoupent celles posées, aujourd’hui, par les autorités maliennes pour engager le dialogue avec les groupes du Nord (renoncer à la lutte armée, respecter l’intégrité territoriale du Mali, exigence du dépôt des armes dans le cours du processus).   Les représentants du MNLA (dont certains responsables sont sous mandat d’arrêt du Gouvernement de Bamako, ce qui n’est pas, par ailleurs la meilleure façon de favoriser une éventuelle négociation) semblent juger que s’ils déposaient les armes, ils ne seraient plus en mesure de s’opposer à d’éventuelles exactions de l’armée malienne et des milices « noires » contre les populations touarègues.   Pour autant, la position de la France est nette : les groupes armés doivent désarmer, il ne saurait y avoir deux armées maliennes, deux administrations maliennes. Seules modalités sont discutables.

Symétriquement, de vrais actes de réconciliation doivent être posés sans lesquels il serait illusoire d’espérer résoudre une question lancinante depuis 50 ans, ou d’atteindre l’objectif d’un rétablissement de l’unité du territoire malien.

Force est de constater que la « démilitarisation » du nord depuis le pacte national et les accords d’Alger, en 1992 et 2006, a contribué à affaiblir l’Etat malien (1 500 à 2 000 hommes « tenaient » un immense espace, de fait livré à lui-même et à tous les trafics). L’armée malienne doit revenir au Nord. L’Etat, ses services publics, doivent s’y réimplanter. Aucune « administration de fait » par une autre entité ne peut être considérée comme acceptable.

Les touaregs sont minoritaire même au  Nord: Il ne faut pas oublier qu’en dehors de Kidal, sans doute les Touaregs sont minoritaires dans les régions du Nord, et en particulier à Gao et Tombouctou.   Il ne faut pas oublier les populations « sédentaires », en particulier les Songhais et les Peuls, non plus que les communautés arabes qui ont, elles aussi, un vrai poids dans la région.   Eleveurs, caravaniers ou commerçants, les Arabes (ou « Maures », suivant les terminologies) ont un poids politique et surtout économique non négligeable, en particulier en raison de leur propension à échanger avec les pays du Maghreb voisin. Trois tribus dominent : les Kountas, alliés aux Berbères, de rang social élevé, les Lehmars à Gao et les Berrabiches, qui auraient constitué la majorité des soutiens d’AQMI et du MUJAO. Ce serait grâce à un Berrabiche, Omar Ould Hamara (dit « Barbe rouge »), haut responsable du MUJAO, que Moktar ben Moktar, (dont certains disent qu’il aurait épousé la fille), serait parvenu à s’implanter dans la région de Tombouctou.   Des lignes de fracture existent aussi dans la communauté arabe, en particulier entre les Kountas (alliés des Ifoghas) et les Arabes du Tilemsi, majoritairement Lehmar. Certains Arabes seraient particulièrement impliqués dans le trafic de drogue, comme les Arabes de Tarkint (liés à l’affaire de l’avion « air cocaïne » en 2009).   La collaboration voire l’alliance désormais bien réelle entre les groupes armés (notamment le MUJAO) et certains narcotrafiquants arabes répondait sûrement à l’origine à une logique opportuniste, beaucoup plus qu’à une logique politique ou religieuse. Elle est toutefois aujourd’hui bien réelle et explique notamment la présence de poches d’insécurité autour de Gao notamment.   La réconciliation de toutes les ethnies du Mali est indispensable pour que les groupes terroristes ne trouvent pas notamment au Nord le soutien de telle ou telle faction de la population. De cette nécessité aussi le Gouvernement malien doit être convaincu.   Source : Jeune Afrique, « Mali : des touaregs réclament une loi criminalisant l’esclavage »

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