Mardi et mercredi derniers, Hamadou Aya Sanogo a longuement expliqué, sur les antennes de l’Ortm, ce qu’il a retenu comme raisons à ce qu’on peut appeler un « atterrissage forcé » du « marsien » Cheikh Modibo Diarra. Le moins que l’on puisse retenir de cette sortie médiatique, c’est qu’autant il a reproché à l’ancien Premier ministre d’avoir été arrogant vis-à-vis du Chef de l’Etat, le Capitaine Sanogo s’est tout aussi rendu coupable de méprises envers son ex-protégé et même du peuple malien. En tout cas, du début à la fin de cette interview télévisée, la moindre courtoisie ne s’est faite sentir dans les propos du Chef de l’ « ex » junte. Propos dont beaucoup de Maliens doutent d’ailleurs de la véracité.

Le ton sur lequel le désormais président du comité militaire de suivi de la reforme des forces de défense et de sécurité a intervenu laisse le sentiment chez beaucoup de téléspectateurs que derrière les explications qu’Amadou Haya a données, se cachaient une volonté manifeste de nuire à un homme. Comment comprendre que Dr Cheikh Modibo Diarra soit ainsi publiquement voué aux gémonies comme s’il n’avait jamais posé le moindre acte positif dans ce pays durant sa « primature ». Heureusement que le président de la République par intérim, Dioncounda Traoré, avait fait preuve de courtoisie en exprimant toute sa reconnaissance à l’ancien Premier ministre pour services rendus à l’Etat. Aussi, des propos péjoratifs du genre « kamalen kun kafala » (le type était devenu arrogant) donnait l’impression que « Mon » Capitaine parlait d’un vulgaire individu alors qu’il était bien question d’un Premier ministre. Quelle méprise ! Mais, quelque « arrogant » puisse être Cheikh Modibo Diarra, il méritait d’être traité avec le minimum d’égard. Il le méritait non seulement en tant qu’ancienne autorité, mais aussi en tant qu’aîné de celui qui a choisi de le vilipender. Sous nos cieux, dans un passé pas aussi lointain, l’arrogance que le Capitaine Sanogo a fait montre vis-à-vis de son aîné Cheikh Modibo était bien condamnable. Mais, hélas.
Pire, durant toute l’interview, le Chef de l’ « ex » junte s’est montré le seul capitaine à bord du bateau Mali. « Je suis prêt à refaire la même chose si n’importe quel Malien constituera un blocage pour la bonne marche de ce pays », avait-il mis en garde. En apprenant de tels propos, beaucoup de nos compatriotes, en tout cas les plus avisés, venaient à comprendre que le peuple souverain du Mali était bien encore aux ordres des bottes, le Président intérimaire ne passant que pour un simple figurant. Qui a donc dit retour à l’ordre constitutionnel ?
Au regard du rythme auquel vont les choses dans notre pays, il y a lieu de craindre que la communauté internationale dont l’appui est aujourd’hui indispensable pour une sortie de crise au Mali ne se rétracte. En effet, la sortie télévisée de l’homme fort de Kati a montré à la face du monde que les kakis étaient loin de se soumettre à un pouvoir civil, comme le veut d’ailleurs la communauté internationale. Aux militaires de comprendre donc qu’il y a un temps pour tout et que le moment était venu qu’ils laissent la main à un pouvoir véritablement civil pour que nous espérons voir un jour le bout du tunnel.
Bakary Sogodogo