Gouvernance institutionnelle : Des Violeurs en série
Depuis le 22 mars, date du renversement du général Amadou Toumani Touré, le Mali est géré par une série d’actes qui jurent tous avec la constitution censée avoir été rétablie. Et tous y participent allégrement et avec la plus grande insouciance.
Les nouvelles autorités persistent et signent dans leur volonté délibérée de violer la Constitution chaque fois qu’ils le désirent. Leur fait d’arme, c’est la formation d’un gouvernement de transition dont la communauté internationale, nouvelle tutelle du Mali depuis le 22 mars 2012, ne s’en offusque même plus. Le pourrait-elle d’ailleurs ?
Les officiers, sous-officiers et hommes du rang qui se sont mutinés le 21 mars, en violation déjà de la loi militaire sur l’indiscipline et l’insubordination, ont été les premiers à donner le ton dès le lendemain. Ce jour, c’est aux aurores qu’ils ont appris au peuple malien qu’ils venaient de commettre un crime imprescriptible contre lui en déposant le président légalement élu. Ils persisteront en suspendant la constitution et en liquidant toutes les autres institutions de la République. Sous un semblant de pressions de la Communauté internationale qu’ils ont refusé d’accueillir à Bamako pour discutailler, ils s’engagent à rétablir l’ordre constitutionnel et, quelques jours plus tard, font semblant de céder en signant, le 06 avril, un accord-cadre. Un document qui, à l’analyse, se révèle contraire à l’esprit de la constitution rétablie. Il y est question de nommer un Premier ministre et un gouvernement de la transition. Or dans le contexte marqué par la démission du chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré, il revient au président de l’Assemblée nationale, Dioncounda Traoré, d’assumer par intérim les charges de président de la République. Mais avec des prérogatives limitées dont l’impossibilité pour lui de nommer ou de congédier un Premier ministre et les membres du gouvernement. L’accord-cadre a été signé le Cnrdre et la Cedeao et accepté par la classe politique et la société civile au mépris du fait que le gouvernement de Mariam Kaidama Sidibé n’avait pas démissionné. D’ailleurs, sa lettre de démission, si elle existe, n’ayant jamais été rendue publique, on est fondé légitimément à soutenir qu’il est le seul gouvernement légal et légitime. Alors de quel droit l’intérimaire constitutionnel se permet-il de nommer un autre chef de gouvernement ? D’aucun. En réalité cette nouvelle violation est plus du fait de la junte et du médiateur que de la décision de Dioncounda Traoré qui n’a fait que l’entériner.
Nommé le 17 avril, le nouveau « Premier ministre avec pleins pouvoirs » est impuissant devant une vague d’arrestations de personnalités proches du général ATT. Qu’elles soient réelles ou inventées, les raisons, atteinte à la sûreté nationale, pour lesquelles ces hommes ont été arrêtés relèvent de la justice. En qualité de quoi c’est le chef de la junte qui donne l’ordre de leur arrestation ? Président du Cnrdre ? Ce comité n’a aucune existence juridique et ne répond à rien, son président n’est officiellement pas une institution devant actionner la machine judiciaire. Et pourtant, la gendarmerie saisie du dossier d’information judiciaire lui obéit au doigt et à l’œil.
Une semaine après sa nomination illégale, le Premier ministre procède à son tour, avec la même illégalité, à la nomination d’un « gouvernement d’union nationale » contesté avant même sa publication par le Front antiputschiste.
Le mardi 24 avril 2012, Siaka Diakité anime une conférence de presse à la Bourse du travail pour dénoncer la manière dont ce gouvernement a été composé.
C. TANDINA
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