Le Gouvernement face au front social en ébullition : La rançon de l’exclusion des politiques
Nul n’ignore qu’au Mali, comme partout ailleurs, des partis politiques vers les centrales syndicales, il n’y a que de minces parois de séparation. Ainsi, la frustration des premiers peut souvent créer des courants de convection assez perturbateurs…
- Maliweb.net -Au moment où le contexte de la Transition (laborieusement amorcée) a plus que besoin d’un climat apaisé pour aider au redressement du pays, le front social s’assombrit de gros nuages.
En effet, la météo sociale annonce des temps fortement menaçants avec l’amoncellement de cumulo-nimbus gros d’orages avec plusieurs préavis de grèves illimitées. Faut-il rappeler que l’UNTM, la plus importante centrale syndicale du pays, projette une grève illimitée à compter du 18 novembre prochain ? Faut-il souligner que certaines des doléances de l’UNTM touchent à l’existence et au fonctionnement de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (OCLEI), donc des griefs plutôt politiques ? Quid des administrateurs civils, menaçants d’une grève illimitée aussi à compter de cette semaine ? Sans compter que d’autres corps socioprofessionnels comme les surveillants de prison, les policiers, les syndicats de l’enseignement supérieur, de la santé, des affaires étrangères, etc, qui projettent des arrêts de travail face à un gouvernement de Transition aux moyens plutôt limités ?
Selon plusieurs observateurs, cette série de grèves pouvaient être désamorcées si le gouvernement de Transition avait une base sociopolitique élargie. Si cette équipe était composée d’acteurs politiques majeurs, ceux-ci auraient pu travailler à dissuader ces dépôts répétés de préavis de grève, car la corrélation entre les chapelles politiques et les milieux syndicaux sont une réalité dans notre pays. A titre d’exemple le Secrétaire général de l’UNTM, Yacouba Katilé et ses répondants dans divers syndicats n’ont-ils pas des accointances avérées avec plusieurs états-majors politiques ? Le gouvernement Moctar Ouane a-t-il une assise sociale large pouvant dissuader les velléités de grèves tous azimuts ? Rien n’est moins sûr. Surtout que plusieurs formations politiques s'estiment avoir été totalement marginalisé dans la formation de cette équipe gouvernementale. Non seulement, le M5-RFP, presque toute la classe politique est exclue du gouvernement. Chacun de ces partis politiques ne se sent pas concerné par les difficultés de cet exécutif. Ils n’attendent qu’avec suspicions, d’ailleurs, le Conseil National de Transition, pour peut-être avoir voix au chapitre ! Là aussi, ils pourraient être déçus ! Ce qui attise la frustration, élément catalyseur de la fronde syndicale. Ce qui rappelle bien les difficultés de l’ancien régime.
En effet, IBK avait minimisé l’équation de l’élargissement de la base sociopolitique du gouvernement, en y nommant des cadres non représentatifs. Ce fut le cas des personnalités comme les Mahamadou Camara, Mahamadou Diarra, Kamissa Camara, Mamadou Gaoussou Diarra, Safia Bolly, Kané Rokia Maguiraga, Jean-Claude Sidibé, Moustapha Ben Barka, etc. Quand le vent de la contestation a commencé à souffler contre sa citadelle gouvernementale mal assise, IBK a vu son pouvoir, fragilisé, prendre de l’eau de toutes parts, avant de chuter comme un château de carte, le 18 août, dans un processus d’érosion progressive sous les coups de boutoirs du mouvement contestataire du M5-RFP.
Or, il est de notoriété qu’un gouvernement est un instrument hautement politique de stabilisation du pouvoir. Et, à ce titre, il doit être constitué de cadres provenant d’organisations sociopolitiques largement représentatives des aspirations des populations. Ainsi, même dans un contexte de grandes difficultés, les membres de l’équipe gouvernementale peuvent jouer leur rôle de vecteur de vent d’accalmie, de dispensateur de décrispation vers leurs organisations de provenance. Ce qui accorde une sorte de délai de grâce ou facilite une forme de moratoire pouvant préserver la quiétude de l’équipe, malgré les tempêtes.
Sur un gouvernement de transition de 25 membres, presqu’aucun n’est mandaté par la classe politique. Alors que la Transition est par excellence une période de recherche de compromis, donc de rassemblement des forces politiques et de la société civile en vue d’éviter les écueils menaçant l’équilibre précaire du moment. Quand les portefeuilles stratégiques sont aux mains des militaires ou des cadres certes compétents mais sans aucun ancrage social ou politique, l’on ne peut que s’attendre à des vents déstabilisateurs venant de n’importe où. C’est donc la rançon de la marginalisation des acteurs politiques. Boubou SIDIBE/Maliweb.net
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