Hamèye Founé, président du Sylima à cœur ouvert : « L’amnistie n’efface pas les faits… L’existence de l’Azawad n’est pas admise … »

Avr 23, 2012 - 18:32
Avr 23, 2012 - 13:14
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M. Hamèye Founé est le président du Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) et juriste dont la réputation n’est plus à faire. Il a bien voulu se prêter à nos questions portant sur l’actualité pour la moins brûlante au Mali, plus précisément à Bamako et au Nord du pays. [caption id="attachment_62267" align="alignleft" width="300" caption="Hamed Founé"][/caption] Maliba-Info : Il est question aujourd’hui au Mali de transition et d’intérim. Quel contenu juridique donnez-vous à ces deux expressions ? En clair qu’est ce qu’une transition  et qu’est ce qu’un intérim juridiquement s’entend, bien entendu? M. Hamèye Founé : L’intérim c’est le temps pendant lequel les fonctions d’une autorité publique sont exercées par une personne autre que le titulaire. Quant à la transition, c’est l’étape intermédiaire observée entre deux régimes politiques et qui n’est pas textuellement prévue. Pour coller au cas malien, l’intérim résulte de l’application de l’article 36 de la Constitution. Il consiste en l’exercice des fonctions de Président de la République par le Président de l’Assemblée Nationale. A l’expiration de la durée de l’intérim, qui ne peut excéder le temps imparti pour l’organisation de l’élection du nouveau Président de la République, s’ouvre la période de transition si éventuellement cette élection n’a pu être concrétisée. Que dit exactement le fameux article 36 de la Constitution du Mali ? Vous avez parfaitement raison de parler de « fameux article 36 ». Ces derniers temps c’est la disposition de la Constitution qui a fait couler le plus d’encre et de salive. L’article 36 de la Constitution du Mali est très simple et très clair. Ce sont les hommes qui veulent lui donner le sens qu’ils souhaitent. Alors que dit l’article en question ? L’article 36 régit l’empêchement du Président de la République et la vacance de la présidence. Pour l’empêchement temporaire, il n’y a aucune difficulté. C’est le Premier Ministre qui exerce provisoirement les pouvoirs du Président de la République. Quant à la vacance, elle doit être constatée par la Cour Constitutionnelle saisie par le Président de l’Assemblée Nationale et le Premier Ministre. Si la Cour Constitutionnelle constate la vacance pour quelque cause que ce soit ou en cas d’empêchement absolu ou définitif, les pouvoirs du Président de la République seront être exercés par le Président de l’Assemblée Nationale et il doit être procédé à l’élection du nouveau Président de la République dans un délai maximum de 40 jours. Enfin le dernier alinéa de l’article restreint les pouvoirs du Président de la République Intérimaire. En effet, cet alinéa énonce qu’il ne peut mettre en application les articles 38, 41, 42 et 50 de la Constitution. L’article 38 est relatif à la nomination et au renvoi du Premier Ministre et des autres membres du Gouvernement. L’article 41 concerne l’organisation de référendum. L’article 42 vise la dissolution de l’Assemblée Nationale. Enfin l’article 50 évoque les mesures exceptionnelles exigées lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la nation, l’intégrité du territoire national, l’exécution des engagements internationaux sont menacés de manière grave. Le mandat de l’actuel président intérimaire peut-il aller au delà des 40 jours ? La Constitution n’envisage pas un tel scénario. En effet, la rédaction de l’article 36 ne permet donc pas au Président de l’Assemblée Nationale d’assurer l’intérim de la Présidence de la République au delà de quarante jours.  C’est d’ailleurs pourquoi l’accord cadre de mise en œuvre de l’engagement solennel du 1er avril 2012 adopté par le Médiateur de la CEDEAO et le Comité National de Redressement de la Démocratie et de la Restauration de l’Etat prévoit la mise en place d’une transition politique devant conduire aux élections. Existe-t-il une jurisprudence en la matière ? Au Mali, je n’en connais pas. Il y a certainement des pays africains ayant connu dans leur histoire des vacances au niveau de la Présidence de la République. Mais je ne saurai vous en dire plus. Qu’est ce qu’une amnistie ? Qui peut en bénéficier et qui est en droit de l’attribuer ? L’amnistie a une notion qui a une origine grecque. Elle signifie simplement « oubli ». Par l’amnistie il s’agit donc d’oublier des fautes passées. L’amnistie n’efface pas les faits. Elle agit sur le sort des faits. Elle empêche de les poursuivre  ou en cas de condamnation elle met fin l’exécution. Qui peut en bénéficier ? C’est tout auteur ou complice des faits amnistiés. Qui est en droit de l’attribuer ? Il s’agit de l’autorité politique. L’article 70 de la Constitution fait relever l’amnistie du domaine de la loi. Quelle lecture faites – vous du cas malien ? Dans le cas malien, c’est l’article 7 – a de l’accord cadre sus évoqué qui prévoit l’intervention d’une loi d’amnistie générale au profit des membres du CNRDRE et de leurs associés ». Il s’agira alors d’amnistier les actes insurrectionnels d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat commis le 21 mars 2012 et jours suivants et d’en faire bénéficier les officiers, sous officiers, hommes de rang et toute autre personne y ayant pris part à quelque titre que ce soit. Que vaut juridiquement la déclaration d’indépendance de l’Azawad ? L’indépendance d’un Etat ne se limite pas à la simple proclamation. Pour que la proclamation de l’indépendance produise ses effets, l’Etat a besoin d’une reconnaissance internationale. Dans le cas spécifique de la République dite de l’Azawad aucun Etat aucune organisation ne l’a reconnu. Même le principe de son existence n’a été admis. Propos recueillis par B.S Diarra

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