L’intégrisme islamiste en pleine expansion à Gao : Quand l'oncle d'un Ministre tombe sous le coup de la charia
L'occupation des régions septentrionales du Mali, par des assaillants nationaux et étrangers, fait place à une forme d'islamisme de plus en plus inquiétante. Après Tombouctou où le confort des intégristes à tourné à la dérive profanatrice contre le mausolée de Saints, c'est au tour des populations de Gao de subir les humiliations dans une autre dimension : une restriction des libertés individuelles au strict minimum, la privation de tout loisir et surtout une application des sanctions punitives sur la scène publique, sans considération aucune pour le rang social ou l'âge des contrevenants aux prescriptions de la charia.
Après avoir progressivement conquis une dose de sympathie chez les populations au détriment du MNLA, les islamistes, incarnés à Gao par Ançardine d'Iyad Ag Ghali, sont vite passés à la vitesse supérieure. L'ordre public, depuis un certain temps, est devenu l'apanage d'une police mise en branle dans la foulée et qui veille scrupuleusement à l'observation des préceptes religieux tels qu'édictés par la loi islamique, en l'occurrence la charia. C'est ainsi tous les vendredis, dans la Cité des Askia, des tribunaux publics prononcent des sentences et les peines y afférentes sont appliquées aux 'justiciables' dans la stricte rigueur, sans égard pour l'âge ou le rang social des contrevenants. Des témoins oculaires confient, du reste, qu'il n'est pas si rare de voir de respectables chefs de famille subir l'humiliation d'une correction publique à la verge, avec un nombre de coups équivalent à la faute qu'on leur reproche. D'autres sont, par ailleurs, simplement emprisonnés et écopent d'une détention temporaire privative de liberté en guise de mesure de police. C'était le cas, par exemple, du célébrissime conseiller communal doublé du titre de Conseiller national, Azaz Ag Loudag Dag, qui a dû se résigner à passer, la semaine dernière, près d'une heure de détention au Commissariat de Gao. Selon nos sources, cette notoriété du milieu touareg a eu maille à partir avec un puissant limier du droit islamique, auprès de qui il a voulu intercéder pour faire libérer une autre personnalité en détention. Son tort, selon les mêmes sources, c'est d'avoir suggéré que son protégé soit transféré de la détention ferme à la garde à vue, chose que le haut responsable de la police islamiste a perçu comme une leçon de charia que tente de lui professer un profane en la matière. Il a donc réagi en ordonnant à ses subalternes de garder l'intercesseur lui-même derrière les barreaux. Après plus 45 minutes de détention ferme, Azaz Ag Loudag Dag n'a finalement dû son salut qu'à la mobilisation de tout un ballet de hautes personnalités de la ville, parmi lesquelles, le richissime transporteur Ali Badi Maïga, logeur d'Iyad Ag Ghali en personne.
Quant au prévenu, pour le compte duquel l'élu national a tenté d'intercéder, il n'est autre que l'oncle direct d'un ministre de la République en fonction dans l'actuel gouvernement du Dr. Cheick Modibo Diarra et dont nous préférons taire l'identité par décence. Contre l'intéressé, les nouveaux tribunaux islamistes de Gao retiennent des fautes gravissimes dont on ne connait pas exactement les peines applicables. On sait en revanche qu'il lui est reproché de s'être indûment approprié les bêtes d'autrui, parmi lesquelles des chameaux et d'avoir plusieurs fois impunément laissé ses troupeaux en divagation dans les champs et cultures maraîchères de tierces personnes. Ainsi le détenu, à la différence de son intercesseur, est maintenu, selon nos sources, dans les liens de la prévention et attend impatiemment qu'une sentence des juges islamistes détermine la dimension de la peine proportionnelle aux fautes qu'on lui reproche, conformément à la charia.
Il aurait à coup sûr bénéficié de tous les privilèges dus à ses liens de parenté avec un membre du gouvernement si la ville de Gao n'était pas coupée du reste du Mali et si l'influence des pouvoirs centraux ne se limitait à Sévaré et environs. Mais ses relations avec le tout nouveau Ministre seraient peut-être même la circonstance aggravante, outre le fait que l'intéressé traine par ailleurs des présomptions d'appartenance au MNLA, un mouvement indépendantiste rival du mouvement islamiste Ançardine et qui lui dispute le contrôle des terres conquises.
Ainsi donc, pendant que la nouvelle équipe gouvernementale conforte ses assises dans la capitale et maintient son véto sur l'arrivée des forces libératrices de la CEDEAO, un nouvel ordre inflige abusivement des punitions abusives et aveugles, sans considération du rang social.
-De la guérilla urbaine à la guerre patriotique
Les paisibles citoyens ordinaires de la Cité des Askia ne vivaient pas une situation plus enviable ,avant d'être poussés à la révolte par les comportements abusifs des nouveaux maitres de la ville. Après avoir sympathisé avec les autochtones à coups de générosités, ces derniers ont sans doute jugé la convivialité déjà assez mûre pour évoluer aux étapes suivantes de l'instauration d'un Etat islamiste. Plus de cigarettes, interdiction pour les femmes d'aller au marché ou de regarder la télé devant les portes, etc.
Ce flot insupportable de restrictions des libertés individuelles et publiques aura été la goutte d'eau qui a sonné la révolte, en début de semaine, dans les rangs de la population. Las d'être continuellement abandonnés par leur armée et les autorités centrales, les habitants de Gao ont fini par prendre leur destin en main en réagissant à la domination étrangère par un héroïsme qui doit faire honte à la junte. Ils ont bravé l'envahisseur à coups de pierres et de manchettes et au prix de leurs vies ont réussi, en tout cas jusqu'ici, à se débarrasser de leur joug. Surpris par ce sursaut patriotique inattendu, les combattants d'Ançardine n'ont eu le choix que de se replier derrière la ville, en dissuadant la meute par des tirs de sommation. En abandonnant du même coup la ville, les envahisseurs ont ainsi fait place à une guérilla urbaine qui consiste désormais à traquer leur présence un peu partout et à protéger les citoyens et leurs biens contre les atteintes.
Cet acte héroïque, en attendant de servir de leçon de patriotisme dans nos écoles militaires, aura donné des idées aux milieux ressortissants nordistes, lesquels se tournent depuis longtemps le pouce devant l'embarras posé par l'occupation sans résistance de leurs terroirs respectifs. Lors de sa dernière rencontre, avant-hier mardi, le COREN a appelé tous les volontaires exilés dans la capitale de se joindre massivement à la résistance des populations de Gao et d'ailleurs, pour bouter les envahisseurs hors des contrées occupées. Idem pour les populations nomades de l'Est de Gao massés depuis longtemps vers la frontière nigérienne. Sous l'égide du Colonel-Major Elhaj Gamou, ils sont en train de s'organiser à leur tour pour la même cause.
NTJI DIARRA
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