Depuis le vendredi 18 janvier, 29 commandos parachutistes détenus dans l'affaire dite des "bérets rouges" ont reçu notification de l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction, FousseyniTogola, leur accorde le bénéfice de la liberté provisoire. Cependant, lesdits détenus restent en taule et les commentaires vont bon train sur leur sort. Pour éclaircir la situation, nous nous sommes transporté au bureau du procureur général près la cour d'appel de Bamako, monsieur Daniel Tessougué.
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Daniel Tessougué, PR[/caption]
Le magistrat, avec lequel nous avons discuté à bâtons rompus, préfère parler de "lenteurs" plutôt que de "blocage" du processus de libération des bérets rouges. Selon le procureur général, la première demande de mise en liberté des 29 bérets rouges a été rejetée par le juge d'instruction. La seconde demande, qui répondait aux conditions légales, a été acceptée par le juge qui s'est prononcé par ordonnance. Le procureur de la république de la commune 3 de Bamako, dont relève l'affaire des bérets rouges, a 3 jours pour faire appel de l'ordonnance; quant au procureur général, il a lui aussi 15 jours pour formaliser son appel contre la même ordonnance. Ces délais - notamment celui du procureur général - n'étant pas épuisés, les bérets rouges restent en prison malgré l'ordonnance rendue en leur faveur. Toutefois, Daniel Tessougué annonce sa décision de ne pas faire appel contre la décision de liberté provisoire. Il tient à rappeler que la mise en liberté provisoire ne signifie pas que les personnes poursuivies soient ou non coupables des faits reprochés. Elle veut tout simplement dire que la détention des inculpés n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.
Le procureur général reconnaît que la perspective de libérer les bérets rouges ne fait pas plaisir à tout le monde; il confirme que dans la nuit du vendredi 18 janvier, des inconnus, à travers des numéros cryptés, l'ont personnellement menacé de mort en lui disant:
" Si vous libérez ces assassins de bérets rouges, on aura votre peau !". Daniel Tessougué nous révèle que même des hommes politiques l'ont appelé pour exprimer leur désaccord avec la libération des bérets rouges. Notre interlocuteur déclare ne pas craindre les menaces :
"Je suis au service de la loi, donc je n'ai pas peur de mourir. Des fils de ce pays sont en train de mourir pour libérer le pays; pourquoi pas moi ?". Le procureur général pense que ceux qui le menacent par téléphone interposé devraient avoir le courage de le faire à visage découvert:
"S'ils ont pu avoir mon numéro de téléphone, ils devraient savoir où me trouver et me parler!". Il se dit convaincu que lesdites menaces ne viennent sûrement pas de la junte militaire de Kati, qui a pourtant intérêt à ce que les bérets rouges ne revoient pas de sitôt les lueurs du jour.
"Le jour de leur procès, si les bérets rouges libérés sont reconnus coupables, ils retourneront en prison. D'ici là, s'ils ne sont pas libérés après épuisement du délai d'appel, je les ferai sortir de prison!", promet-il.
Notons que parmi les bérets rouges bénéficiaires de l'ordonnance de liberté provisoire figurent Mamadou Lamine Konaré, le fils de l'ancien président de la République, ainsi que le colonel Hamidou Sissoko, ancien chef d'état-major particulier du président ATT. Mais l'ancien chef de bérets rouges, le colonel AbidineGuindo, n'y figure pas: l'intéressé n'a même pas formulé de demande de liberté.
Abdoulaye Guindo