Le Mali s'engage sur le chemin d'un accord de paix
![L’Algérie médiateur du dialogue inter-malien ?](http://www.maliweb.net/wp-content/news/images/2014/07/MNLA-Alger.jpg)
AFP PHOTO/FAROUK BATICHE[/caption]
Le 24 juillet, à Alger, Paris et Bamako, la tragédie humaine et l'émotion balayèrent soudainement tout le reste. Le vol Ouagadougou-Alger venait de disparaître avec 118 personnes à son bord, dont 54 Français. On ne savait alors dans quelles circonstances le crash avait eu lieu, ni où, dans cette zone sahélienne épicentre de tant de tensions.
Les regards scrutaient le désert malien à la recherche des disparus du vol AH 5017. On n'excluait pas l'éventualité d'un attentat. « Du coup, on a aussi disparu des écrans radar alors que nous venions de poser un acte important », ironise un diplomate malien.
A Alger, ce 24 juillet, son gouvernement et les rebelles du Nord cosignaient en effet un texte prometteur. Une feuille de route encore fragile mais qui a l'ambition de faire cesser les hostilités et d'établir les conditions d'une paix durable au Mali. Et cela seulement quelques mois après le quasi-effondrement de l'Etat sous la poussée d'une coalition hétéroclite d'indépendantistes touaregs et de groupes arabes accoutumés aux rébellions contre Bamako, de djihadistes d'origines diverses nouvellement inspirés par Al-Qaida, le tout irrigué par le produit hautement rémunérateur d'intenses trafics de narcotiques dans la bande sahélienne.
« ACCORD DE PAIX GLOBAL ET DÉFINITIF COURANT OCTOBRE »
Faut-il parier sur cette nouvelle tentative de règlement du conflit Nord-Sud au Mali, alors que l’histoire récente de cette ancienne colonie française est jalonnée de rébellions meurtrières depuis son indépendance en 1960 et d’autant d’accords morts-nés ?
« La pression internationale est aujourd’hui plus forte que jamais sur les rebelles et le pouvoir à Bamako », veut croire un diplomate français. Il est vrai que, depuis l’intervention de l’armée française qui stoppa l’avancée djihadiste en janvier 2013 et fut suivie du déploiement d’une mission civile et militaire musclée de l’ONU, jamais autant de pays ne s’étaient penchés sur le sort du Mali.
Ainsi, autour de la table des négociations à Alger, en juillet, il n’y avait pas que les représentants du gouvernement malien face à ceux de six groupes armés du Nord : le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), la Coalition du peuple pour l’Azawad, la Coordination des mouvements et forces patriotiques de résistance et une dissidence du MAA, dite MAA-Bamako.
Il y avait aussi, en plus des délégués algériens fortement impliqués, une flopée de « facilitateurs » internationaux représentant les pays du « G5 du Sahel » (Tchad, Niger, Burkina Faso, Mauritanie, Mali) et d’organisations régionales et internationales : Nations unies, Union africaine, Union européenne, Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest, Organisation de la conférence islamique.
Pour en arriver là, il aura aussi fallu en passer par les événements tragiques de Kidal, le 21 mai, qui ont fait l’effet d’un électrochoc. Ce jour-là, l’offensive désordonnée et mal évaluée de l’armée malienne contre le fief des groupes armés du Nord s’était soldée par une débandade militaire et la mort de dizaines de soldats. « Six mois d’efforts pour faire revenir l’Etat dans le nord du pays ont été réduits en poussière et ont montré l’incapacité de notre armée à reprendre le contrôle de la zone par la force », concède un haut fonctionnaire à Bamako.
Ce fiasco semble avoir subitement réveillé les autorités politiques maliennes, en place depuis l’élection à la présidence d’Ibrahim Boubacar Keita en août 2013. Elles ont tardé à engager franchement le processus de négociation avec le Nord, pourtant promis dans les accords de Ouagadougou signés en juin de cette même année entre les belligérants. Le premier ministre Moussa Mara promet dorénavant de conclure « un accord de paix global et définitif courant octobre ».
« PRISE DE CONSCIENCE »
« A Bamako, il y a eu une prise de conscience, observe un diplomate occidental qui affiche son optimisme sur l’issue des discussions. Quant aux rebelles, ils savent qu’ils sont sans doute arrivés à la limite de ce qu’ils peuvent prouver par les armes contre Bamako maintenant que des soldats étrangers sont déployés. »
L’intervention française de 2013 avait fait refluer au nord de Gao et de Tombouctou les groupes indépendantistes touareg et arabes. Elle avait aussi décimé les rangs des djihadistes qui « ne seraient guère plus de 200 aujourd’hui, sur un territoire désertique grand comme les trois quarts de la France », selon les décomptes d’un militaire.
Aujourd’hui, les survivants de la prise de contrôle éclair, en 2012, de la moitié du pays contre une armée malienne démotivée, font face à plus de 1 000 soldats français entraînés, équipés et déployés sur le sol malien. Ils peuvent compter sur 2 000 autres soldats dotés de drones et de chasseurs, présents au Niger et au Tchad dans le cadre de l’opération « anti-terroriste » régionale « Barkhane ». Plus les quelque 6 000 casques bleus de la Mission intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma).
« Les combats qui opposent ces dernières semaines le MNLA à une coalition de groupes arabes pour le contrôle de certaines zones et routes de trafic montrent aussi que différents groupes armés sécessionnistes ont atteint la limite de leur union. Les négociations d’Alger sont finalement une chance pour eux », ajoute cette source militaire.
A condition qu’elles aillent jusqu’au bout et que les réformes de fond évoquées par Bamako – transfert de pouvoir, développement de ces régions qui se perçoivent comme marginalisées par rapport au Sud, réinsertion des anciens rebelles – ne se perdent pas dans les sables.
Lire aussi l’entretien : Mali : « Tous les rebelles savent qu’ils ne pourront satisfaire leurs revendications par les armes »
Christophe Châtelot ,http://abonnes.lemonde.fr/international/article/2014/08/02/le-mali-s-engage-sur-le-chemin-d-un-accord-de-paix_4466057_3210.html
Journaliste au Monde
Quelle est votre réaction ?
![like](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/like.png)
![dislike](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/dislike.png)
![love](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/love.png)
![funny](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/funny.png)
![angry](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/angry.png)
![sad](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/sad.png)
![wow](https://site.maliweb.net/assets/img/reactions/wow.png)