Cette vague de rumeurs et de déclarations s'engage jeudi 28 février avec l'annonce de la mort d'Abou Zeid, l’un des dirigeants d’al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) par une télévision algérienne.
Le lendemain matin, une source proche des services de renseignements français annonce à RFI que des tests ADN sont en cours. Des prélèvements auraient été effectués sur le cadavre d'un jihadiste qui ressemble à l'émir d'Aqmi : petite taille, sec, barbe grisonnante.
Mutisme à Paris et Bamako
La France refuse de commenter ce dossier. C’est la ligne de conduite qu'elle maintient depuis. Ce n’est pas celle du Tchad. Vendredi soir,
son président, Idriss Deby Itno, affirme qu'Abou Zeid est bel et bien mort, qu'il a été tué par des soldats tchadiens le 22 février dernier. Puis samedi 2 mars dans la soirée, c'est l'état-major à Ndjamena qui s'exprime et annonce cette fois-ci... la mort de Mokhtar Belmokhtar.
Dimanche en milieu de journée, RFI contacte un général tchadien présent dans la zone des combats. Il déclare au sujet de Belmokhtar : «
Nous n'avons pas vu son cadavre mais six prisonniers nous ont affirmé que la base des terroristes est entièrement détruite et que leurs chefs sont morts ». Deux morts annoncées coup sur coup donc mais toujours sans aucune preuve à l’appui.
Pour faire taire les critiques, les autorités tchadiennes décident d'envoyer des journalistes à Tessalit, point de départ des opérations militaires. Dimanche après-midi, l'envoyé spécial de RFI rencontre des soldats tchadiens revenants du front. L’un d’entre eux montre sur son portable une
photo présentée comme celle du cadavre de Belmokhtar, que le journaliste de RFI prend à son tour en photo. L’état-major autorise sa publication en laissant entendre qu’il s’agit bien du jihadiste borgne. Entre temps, l’armée tchadienne a remis d’autres images aux journalistes.
Une photo au coeur de la polémique
La photo supposée de Belmokhtar n'est pas de bonne qualité. Le combattant est au sol, on distingue sa barbe, sa bouche, ses yeux sont recouverts d'un chèche. Un second journaliste présent affirme dans l’hebdomadaire français
Paris-Match que la photo a été prise le 2 mars, samedi soir donc, et que c'est le cadavre d'Abou Zeid qui apparaît sur le cliché…
Contactés, deux journalistes de la sous-région qui ont croisé plusieurs fois les deux chefs d'Aqmi ces derniers mois, se disent incapables de reconnaître Abou Zeid ou Belmokhtar sur cette photo. A Paris, les autorités ne confirment aucune de ces différentes versions, ajoutant un peu plus à la confusion.
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L'armée tchadienne présente une image du passeport de Michel Germaneau
Parmi les photos transmises par l'état-major tchadien, notre correspondant a découvert une image du passeport de
Michel Germaneau, otage mort en 2010 après l'échec de sa tentative de libération dans le nord du Mali.
Le passeport du Français Michel Germaneau, né le 5 juillet 1932 a été retrouvé pendant le ratissage des montagnes de Tigharghar.
Photographié par l’armée tchadienne, il fait partie du dossier qui a été remis aux journalistes dimanche 3 mars. «
La première page du passeport du Français indique qu’il a été délivré en 2004 et devrait expirer en 2014. A l’analyse, la photo a été prise le 28 février, quelques jours après la première bataille des jihadistes contre l’armée tchadienne. C’est au cours du ratissage que nous avons retrouvé le passeport ainsi que plusieurs autres documents. Deux hommes interceptés dans le secteur où le passeport a été retrouvé et d’autres éléments devraient permettre de faire la lumière sur plusieurs aspects de l’occupation de ce massif montagneux par les islamistes depuis dix ans »
, indiquent les militaires.
Le passeport a-t-il été remis aux Français ? Les Tchadiens ne le disent pas. En revanche, selon plusieurs officiers, les centaines de documents et matériels électroniques récupérés devraient permettre d’en savoir plus sur le vrai visage et ce que faisaient vraiment les groupes salafistes.
Par
RFI