Nord du Mali : A qui profite l’accord de cessez-le feu?

Fév 23, 2015 - 21:25
Fév 23, 2015 - 12:17
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Seconde phase des pourparlers d'AlgerL’accord de cessez-le feu signé vendredi dernier à Alger est totalement dépourvu de sens.  Cette entente, à peine signée, soulève de plus en plus de critiques, surtout qu’elle achève le projet avorté de la Minusma: la fameuse zone de sécurité ayant conduit à la mort de trois personnes à Gao. Hélas, le gouvernement malien a signé ledit accord, alors que l’armée n’a mené aucune opération militaire au nord du pays depuis sa déroute à Kidal. Reste à espérer que cet engagement des autorités ne tue pas le dernier espoir des populations: les milices d’autodéfense qui ont réussi là où l’Etat a échoué. Selon de nombreux ressortissants du nord, l’accord de cessation des hostilités qui vient d’être signé à Alger cache une combine. L’objectif serait d’obtenir ce que la Minusma et le Mnla n’ont pu avoir à travers le fameux accord d’une zone de sécurité. La Minusma avait rapidement retiré cet accord après la mort de trois personnes à Gao, un accord jugé trop favorable au groupe Mnla-Hcua-Maa. Le document signé à Alger suggère qu'en attendant la conclusion et l'entrée en vigueur d'arrangements définitifs, les parties doivent observer une cessation définitive de toutes formes de violence et s'abstenir de tout acte ou propos provocateurs; respecter les engagements contractés en vertu des accords (précédents). Il stipule aussi que les protagonistes doivent mettre rapidement en œuvre, avec l'appui de la Minusma et en étroite collaboration avec elle, toutes les mesures de confiance adoptées, notamment le mécanisme visant à faciliter l'application du cessez-le-feu figurant dans la déclaration de cessation des hostilités et à assurer la protection des civils. Les signataires doivent constater et signaler, chaque fois que de besoin, à la médiation tout acte contraire au dit accord; poursuivre la mise en œuvre des mesures de confiance, notamment la libération des personnes détenues. Ils ont obligation de poursuivre la négociation dans le cadre du processus d'Alger dans un esprit constructif, ouvert et inclusif en vue de s’attaquer durablement aux causes des tensions observée surtout récemment sur le terrain.   Un accord qui profite au Mnla? Ce qui révolte le plus les citoyens dans cet accord, c’est qu’il profite au Mnla et ses alliés qui sont plutôt en difficulté sur le terrain. La milice d’autodéfense Gatia et ses associés ont, en effet, pris de l’avantage sur les troupes séparatistes qui ont perdu de nombreuses positions récemment. Aux difficultés militaires des séparatistes s’ajoute les dissensions internes dont la défection de la tribu arabe des Oulad Idriss qui ont annoncé leur ralliement au camp de la paix et de l'unité du Mali. Aly Ould Hamaha, le petit frère du djihadiste Oumar Ould Hamaha, déclarait à la presse que l’objectif de cette tribu est de défendre les droits légitimes des populations et non d'exploiter leur misère de se servir d'elles. «Les opérations militaires lancées contre des civils à Tabankort comme ailleurs dans le Nord m'ont choqué. Ces actes étaient de trop et il fallait soit arrêter soit choisir son camp. C'est ce que j'ai fait. Je me suis joint à la plate-forme (Gatia et alliés) des mouvements d'autodéfense qui défendent l'unité nationale et le peuple malien contre des atrocités», déclarait Aly. Un des avantages de l’accord de cessez-le feu signé à Alger est qu’il permet de geler les positions sur le terrain. Et ce gel des positions était l’un des objectifs de la zone de sécurité que la Minusma avait concoctée pour le Mnla et ses alliés. Mais c’était sans compter sur la détermination des jeunes de Gao qui ont manifesté contre le geste de la Minusma à l’endroit des séparatistes. La cessation des hostilités est en faite une bonne chose, mais beaucoup de Maliens se posent des questions sur la bonne foi de ceux qui l’ont facilité. «Pourquoi la médiation, la Minusma et la France n’ont pas exigé un accord de cessez-le feu lorsque, après l’échec de l’armée à Kidal en mai 2014, les séparatistes ont profité de l’occasion pour occuper de nouvelles positions jusque dans les régions de Gao et de Tombouctou ? Cela s’est fait au vu et au su de la Minusma et des forces françaises, mais personne n’a demandé un cessez-le feu à l’époque», s’interroge un analyste. L’accord de cessez-le feu d’Alger risque une fois de plus de conduire à des tensions, surtout s’il doit aboutir à imposer des mesures restrictives aux milices d’autodéfense. Pour les populations du nord, ces milices constituent le dernier rempart contre les groupes armés criminels. En tout cas, il faudra bien de tours pour que le gouvernement parvienne à se faire comprendre sur la signature de cet accord. Le peuple malien se sent lésé, en particulier les populations du nord. Soumaïla T. Diarra    

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