Au cours du week-end, le président burkinabé a reçu une délégation du Mnla venue lui proposer de négocier pour une sortie de la crise sécuritaire du nord malien. Avant toute chose, les indépendantistes ont été priés de se défaire de leurs encombrants alliés.
[caption id="attachment_59057" align="alignleft" width="310" caption="Moussa Ag Assarid"]
![](http://www.maliweb.net/wp-content/news/images/2012/04/Assarid.jpg)
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Samedi dernier, une délégation du Mnla (Mouvement national pour la libération de l’Azawad, indépendantiste) conduite par Ibrahim Ag Mohamed Assaleh a été reçue par le président burkinabé, Blaise Compaoré, médiateur dans la crise institutionnelle et sécuritaire au Mali. Selon les rares informations qui ont filtré de cette rencontre, le mouvement indépendantiste est venu à Ouagadougou muni d’une liste de revendications à négocier avec les autorités maliennes. Mais la question que bon nombre d’observateurs et de connaisseurs de ce dossier se posent, c’est de savoir sur quelles bases le Mnla veut négocier. Qu’est-ce que les indépendantistes ont à proposer ou à échanger, que représentent-ils, qu’espèrent-ils ?
A l’analyse de la situation qui prévaut depuis quelques temps dans le nord du Mali et des rapports de force sur le terrain, il est évident que le Mnla ne représente plus rien, ne pèse rien puisqu’il ne contrôle plus grand-chose à commencer par ses propres troupes qui dépérissent de jour en jour au profit de ses bientôt ex-alliés.
Le Mnla ne représente rien, ne pèse rien
En effet, le mouvement indépendantiste a perdu une grande part de sa crédibilité auprès de ses bailleurs de fonds dès l’instant où certains de ses responsables ont cru devoir fusionner leur mouvement avec celui des islamistes radicaux pour former un seul et unique Etat islamique indépendant de l’Azawad. Ces bailleurs de fonds, pour la plupart issus de pays occidentaux où les indépendantistes ont pu les gagner à leur cause en brandissant le statut de minorité ethnique martyrisée, ont en horreur toute forme d’intégrisme religieux. La raison est que cet intégrisme s’exprime toujours par la violence et le terrorisme à leur détriment. A la création encouragée du Mnla, l’Occident avait nourri l’espoir de le voir éradiquer les menaces terroristes en provenance du nord malien choisi comme sanctuaire par diverses cellules activistes d’Aqmi. C’était compter sans Ansar Eddine dont la composition, essentiellement touarègue, a favorisé un rapprochement ethnique avec le Mnla. Les deux mouvements ont les mêmes origines ethniques et communautaires, et malgré les clivages sociaux, souvent très importants, ils n’ont pas mis longtemps à opérer une unité d’action pour la conquête du nord. Ils seraient allés loin dans la fondation d’un Etat islamique si de part et d’autre les « parrains » n’avaient pas réagi, les uns pour exiger la laïcité, les autres pour imposer la charia. Deux philosophies irrémédialblement inconciliables. Et il se trouve qu’aujourd’hui, le Mnla, prématurément lâché par ses commanditaires, a perdu le nord et veut se retourner.
Le voyage de Ouagadougou s’inscrit, à la demande des « parrains », dans le cadre d’une révalorisation du mouvement. En somme, il s’agit pour la rébellion de réussir les mêmes coups que par le passé. A savoir, caser ses chômeurs et pressurer l’Etat. En 1991, 1992 et 2006, des accords ont permis aux communautés arabo-touarègues de faire intégrer plusieurs de leurs membres dans les forces armées et de sécurité, et dans la fonction publique malienne.
Circulez, il n’y a rien à négocier !
Déjà en ces temps, la signature de ces accords ont été critiqués par de nombreux esprits avisés. Ils le seront encore plus s’il venait à l’esprit des autorités de voter une nouvelle loi d’amnistie en faveur des rebelles. En effet, au cours du présent conflit, ils sont allés trop loin, jusqu’à franchir le Rubicon de la barbarie et de la sauvagerie dans toutes les localités conquises par leurs troupes. Il y a eu de nombreux cas de crimes de guerre (tortures morales et physiques, mutilations et assassinats de militaires, etc.) et d’atrocités et exactions (viols y compris sur mineures, pillages, enlèvements, séquestrations, privations de droits et de libertés, etc.). Les auteurs et complices de ces crimes vont-ils bénéficier de l’impunité dont ont bénéficiée leurs aînés ? Sûrement pas. Ils doivent être poursuivis, jugés et punis conformément aux lois nationales et internationales en vigueur. Pour l’exemple, les autorités nationales et la communauté internationale doivent enrayer cette propension des Pouilleux, chaque fois qu’ils souffrent du chômage ou du sous-développement, à prendre ou à retourner les armes contre le pouvoir central. En effet, il faut crever l’abcès une fois pour toutes sinon n’importe quand, de n’importe quel coin du nord, quelques pouilleux, fatigués d’écraser leurs poux, de traire leurs brebis ou de vendre des dattes, seront encouragés à prendre les armes.
Le médiateur et certains responsables seraient tentés de dire qu’une négociation est à envisager au nom de la paix et de la sécurité, si le Mnla veut agir dans ce sens que ses membres se constituent prisonniers, qu’ils se livrent pour être jugés par les nombreux et impardonnables crimes commis. Il n’y a aucun autre avantage à leur accorder à part faire la guerre, seule éventualité à laquelle doivent être contraintes les autorités pour sécuriser et pacifier durablement le septentrion.
C’est le seul message que les Maliens autorisent Blaise Compaoré à donner aux indépendantistes lors du second round de leur rencontre. Circulez, il n’y a rien à négocier !
Cheick Tandina