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
Mohamed Ali Bathily et Daniel Tessougué[/caption]
Le ministre de la Justice, Mohamed Ali Bathily, a refusé de mettre à la disposition des magistrats de la Cour d'appel le budget devant prendre en charge l'organisation de la Cour d'assises, dont l'ouverture était prévue pour hier à la Cour d'Appel de Bamako. Selon certaines indiscrétions, le ministre ne veut pas des assises tant que l'actuel Procureur général près la Cour d'Appel, avec qui il ne souffle pas dans la même trompette, est en poste. Du coup, ce sont plusieurs dizaines de justiciables emprisonnés qui sont privés de leur droit à être jugés.
Par une correspondance datant de début janvier 2014, le Procureur général près la Cour d'Appel de Bamako, Daniel Amagoin Tessougué, a sollicité du ministre de la Justice le déblocage du budget prévu pour l'organisation de la première session de la Cour d'assises durant cette année 2014. Le parquet rappelait dans cette lettre que l'ouverture des assises était prévue pour le lundi 24 février 2014. Le ministre n'a pas daigné répondre à cette sollicitation. Informé de mutisme du Garde des Sceaux, le Secrétaire général du département a été contacté afin de relancer le ministre en vue de faire prendre les dispositions utiles pour l'organisation des audiences.
Les assises devaient inscrire au rôle, explique un juge,
"près de 120 dossiers essentiellement de personnes privées de liberté depuis plusieurs années". Et ce magistrat de s'insurger contre la volonté délibérée du ministre de la Justice de bafouer les droits des accusés de voir leurs cas tranchés.
Pour un autre magistrat que nous avons rencontré hier à la Cour d'Appel de Bamako, le ministre Mohamed Ali Bathily n'a même pas daigné donner suite à la liste des assesseurs que le Parquet lui a transmise et qu'il devait valider à travers un arrêté. Ce qui démontre de sa part une volonté claire de bloquer l'ouverture des assises ce 24 février.
Selon certaines sources proches de la famille judiciaire, la mésintelligence entre le Garde des Sceaux et le Procureur général près la Cour d'Appel est à la base de ce report sine die de la Cour d'assises. Mohamed Ali Bathily aurait laissé entendre qu'il n'y aura pas d'assises tant que Daniel Amagoin Tessougué sera à son poste.
Il faut rappeler que le Procureur général s'oppose à certaines mesures jugées illégales que le ministre de la Justice essaie de prendre dans sa volonté de "
caporaliser la justice". C'était le cas dans la décision de suspendre certains magistrats ou dans son intrusion dans le domaine des poursuites, en foulant souvent au pied le principe de la présomption d'innocence.
En ajournant ainsi sans raison valable la tenue des audiences de la Cour d'assises, ce sont des centaines de citoyens qui voient leur droit à une justice saine et équitable foulée au pied par celui-là même qui est chargé d'administrer la politique criminelle du pays. Pour sa simple et petite volonté de prouver que c'est lui qui a le pouvoir (de décider de la tenue ou non des assises) le ministre de la Justice maintient encore en prison des chefs de famille dont certains vont purger des peines simplement indues.
Bruno D SEGBDJI