Roue libre : Kidal : Une victoire au goût amer de la quinine

Avr 15, 2013 - 05:50
Avr 15, 2013 - 05:53
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New York, 8 mars 1975, match du siècle entre Joseph Frazier et Mohamed Ali au Madison Square Garden. Titre en jeu : le championnat du monde de boxe des poids lourds conclu en douze rounds. Contre toute attente au huitième round Cassius Clay, le champion en titre va  au tapis pour le compte. Mais son adversaire a les yeux fermés, le visage tuméfié, les joues boursouflées. Il est transporté d'urgence à l'hôpital où Ali lui rend visite. Joe "le taureau " venait de remporter une victoire à la Pyrrhus dans laquelle il a failli laisser la vie. [caption id="attachment_103732" align="alignleft" width="250"]Mamadou Lamine Doumbia MLD, chroniqueur Mamadou Lamine Doumbia MLD, chroniqueur[/caption]

A contrario, lors de la troisième guerre punique le Sénat envoya Scipion ''l'Africain'' qui  vainquit Hannibal à Zama. Après avoir détruit Carthage, tué jusqu'aux coqs des Carthaginois, réduit leurs  femmes en esclavage, les Romains leur imposèrent les dures conditions de l'humiliation du vaincu. Non seulement Carthage ne devait plus élever d'éléphants (la force de son armée), elle ne devait pas non plus  livrer une guerre sans l'aval de Rome. Ironie de l'histoire, vaincus à leur tour par les Samnites au cours de trois guerres successives, les légionnaires romains subirent la triste humiliation de passer sous les fourches  Caudines, un défilé étroit de la vallée du Samnium.

Quoi de commun entre big Joe, un vainqueur qui se retrouve à l'hôpital et dont le sort était entre les mains  de Dieu et le chef des Carthaginois dont le sort a été définitivement  scellé par les armes ? A y regarder de près pourtant le sort de l'un ni de l'autre  n'est enviable. Autant  il y a des victoires qui coutent cher, autant il y a  des défaites qui honorent. Sikasso, est certes, tombée sous les tirs des canons français mais  le nom de son roi, Babemba Traoré, est passé à la postérité.  C'est tout simplement dommage que le stade qui porte son nom dans la capitale du Kénédougou soit en pleine dégradation. Le tata aussi en ruine et la colline du mamelon rangée dans le musée de l'antiquité. Faut-il en appeler à la générosité de Poulo  le politicien le plus en vue de la région qui feint de ne pas voir ce qu'il voit tous les jours ? Certes, comme l'a dit Jules Ferry, après le pain vient l'éducation, mais encore faut-il  sauvegarder le patrimoine national pour en plus attirer les touristes surtout que la Bible dit que l'homme ne se nourrit pas seulement que de pain. Et à ce qu'on sache les talibans ne sont pas encore arrivés à Sikasso.

Trêve de balivernes, après l'intervention des forces françaises et africaines, le Mali se trouve  aujourd'hui dans la triste situation du vainqueur qui souffre. Parce qu'a propos de Kidal, nos dirigeants ne disent pas la vérité au peuple. Ils mentent comme des arracheurs de dent. Dioncounda, un président  par défaut appelé par la providence et son premier ministre incompétent nous mènent en bateau chaque jour. Au moins sur ce point il faut donner raison à la COPAM qui dit que ces deux  hommes ne font  pas l'affaire  du Mali. Ils nous cachent le deal qu'ils ont passé avec la France à propos des otages détenus par AQMI. Pour les mêmes raisons, la France mène un double jeu au nord. Elle ménage le MNLA avec qui elle collabore tout en empêchant  la présence de l'armée malienne dans la capitale de l'Adrar des Ifoghas. Finalement on se demande  si la France  est venue nous libérer ou libérer ses otages. On a pourtant été largement reconnaissant au peuple  français et à ses dirigeants pour leur œuvre salvatrice.

Au Mali, des drapeaux tricolores flottent sur toute l'étendue du territoire, des Damien Boiteux et des Hollande naissent chaque jour, même  dans les chaumières  on chante le coq gaulois mais rien n'y fait. Très contents au départ, les Maliens  sont indignés  et très remontés  contre leurs sauveurs et leurs  propres  dirigeants qui jouent au tartuffe. Ils commencent à en avoir marre  parce qu'ils ne comprennent rien à rien. Les journalistes  ont tout fait  pour leur tirer les vers du nez sur la situation à Kidal. Harcelé par la presse c'est d'abord le porte parole de la MISMA, le colonel Yao Aldjoumani qui dit  que l'armée malienne  sera bel et bien présente à Kidal. Un autre jour un officier  supérieur affirme  à son tour que cette absence est due au manque de logistique. Le même officier qui était    pourtant  l'autre jour sur le terrain au nord a dit que l'armée a reçu plus d'une centaine de  pick up et que d'autres commandes sont attendues incessamment.

Pour les Maliens, Kidal est une question de vie ou de mort. Tant que ce problème n'est pas réglé rien  ne le sera. Tout aussi inquiétant  est l'étrange silence des députés sur cette  question alors qu'ils ont l'impérieux devoir d'interpeller le gouvernement et même de lui poser une motion de défiance. Pendant  plus de vingt ans l'assemblée nationale n'a été qu'une  caisse de résonnance du régime et cette sale habitude continue même en cas de crise fatale à la mère patrie. La complicité avec le pouvoir sur fond de mauvaise gouvernance  est un crime contre le peuple. Evidemment cela ne fait qu'arranger les affaires des criminels du MNLA qui continuent toujours de tuer les populations innocentes.

Mamadou Lamine DOUMBIA

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