Selon une enquête d'opinions réalisée à Bamako par la fondation Friedrich Ebert sur la transition au Mali : 55% des citoyens pour la guerre au Nord - 34% pour les négociations - 91,69% pour les élections après la libération des régions du Nord

Déc 4, 2012 - 18:30
Déc 5, 2012 - 06:20
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Depuis le coup d'Etat de mars 2012, le Mali est rentré dans une période de crise politico-institutionnelle et sécuritaire ayant conduit le pays à se doter d'Institutions de Transition dont les deux missions principales sont la libération des régions Nord occupées et l'organisation des élections. Que pensent les citoyens de cette crise et des Institutions mises en place pour sa gestion ? Quelles sont leurs appréciations des diverses mesures envisagées pour la sortie de crise et du rôle des différents acteurs ? Quel profil pour les futurs leaders politiques ? Pour répondre à ces questions, la Fondation Friedrich Ebert a commandité, du 6 au 12 novembre, une enquête d'opinions à Bamako. De l'étude conduite par le socio-anthropologue, Dr Ibrahima Cissé, il ressort que  55% des citoyens sont pour la guerre pour libérer le Nord du Mali, contre 34% pour les négociations. 91,69% des Bamakois sont pour des élections après la libération des régions du Nord. Nous avons pu nous  procurer  ce précieux document de 33 pages qui circule dans les milieux diplomatiques. Les résultats de cette étude, qui a porté sur 385 personnes habitant le district de Bamako, choisies au hasard suivant la méthode des quotas (un principe de choix raisonné utilisé pour des échantillons de moins de 1000 individus), sont assez instructifs. Ainsi, selon les Bamakois, diverses stratégies peuvent être envisagées pour la libération des régions du Nord. Les résultats de l'enquête indiquent que 55% des citoyens souhaitent que soit privilégié l'usage de la force militaire, contre 34% qui sont favorables aux négociations et 11% aux deux simultanément. Les hommes (61%) seraient plus favorables que les femmes (47%) à l'usage de la force militaire. Cette stratégie est plus privilégiée par les jeunes de 18-34 ans (58%) que par les moins jeunes (49% des 35- 49 ans) et les plus âgés (47% des 50 ans et plus). En rapport avec le niveau d'instruction, la proportion des partisans des négociations est plus élevée chez les "sans" niveau d'instruction et niveau fondamental (43%), contre 27,14% et 17% respectivement pour le niveau secondaire et le niveau supérieur. La proportion des militants politiques à prôner la force militaire est élevée (65,56%). A l'opposé, celle des non militants est plus élevée parmi ceux qui prônent la négociation. Les trois quart (75%) des citoyens enquêtés sont favorables à une intervention militaire française pour la libération des régions Nord du Mali dont 56% jugent cette intervention "nécessaire " et 19% la jugent même "indispensable". Ceux qui ne lui sont pas favorables représentent 20% des citoyens dont 13% la juge "pas nécessaire " et pour 7% elle serait "inacceptable". Environ 4% des citoyens sont "sans opinion". La proportion des enquêtés "hostiles" à une intervention militaire française est plus élevée chez les hommes (25%) que chez les femmes (17%). Les 79% des enquêtés sont favorables à une intervention militaire américaine pour la libération des régions Nord du Mali dont 56% la jugent "nécessaire" et 25% la jugent " indispensable". Ceux qui sont contre cette intervention représentent environ 16 % des citoyens dont 4% la jugent "inacceptable". Selon les enquêtés, le Gouvernement devrait négocier avec tous les acteurs : les élus des régions du Nord, le MNLA et Ançar Dine. Toutefois les citoyens enquêtés souhaitent en majorité que soit privilégiées les négociations avec Ançar Dine (pour 43%) contre 28% avec le MNLA. Les partisans des négociations estiment que les points suivants ne sont pas négociables: l'intégrité territoriale citée par plus des trois quart (75,32%), l'unité nationale (54,03%) et le caractère laïc de l'Etat (49,09%). Les élections après la libération du Nord ! La quasi-totalité (91,69%) des enquêtés souhaite que les élections à venir se fassent après la libération des régions du Nord contre seulement 7% qui trouvent le contraire. Cette opinion est partagée presque dans les mêmes proportions par les hommes que les femmes et par les trois groupes d'âge. Environ 82% des citoyens ont déclaré qu'ils voteraient aux prochaines élections contre 14% qui ne voteraient pas. La proportion des abstentionnistes serait plus élevée chez les femmes (21%) que chez les hommes (9%). Pour les futurs votants, comme on pouvait s'y attendre, leur proportion serait plus élevée chez les jeunes (84,65%) contre 77,53% pour les 35-49 ans et 76,36% pour les 50 ans et plus. La grande majorité de ceux qui envisagent de voter (90%) justifient leur attitude par le devoir civique afin de choisir leurs dirigeants, tandis qu'une minorité (environ 10%) conditionne sa participation soit à la présentation de son candidat, soit à la bonne organisation des élections. Ceux qui n'envisagent pas de voter (14%) justifient leur décision par le manque de transparence des élections, leur absence d'esprit civique leur manque de confiance en la classe politique. D'ailleurs pour la majorité des enquêtés (57,40%), les activités des partis et regroupements de partis créés après le 22 mars ont pour objectif la défense des intérêts personnels. Plus du cinquième (22%) affirme que ces activités visent à opposer les Maliens et environ la même proportion pense qu'elles ne visent que le pouvoir, pour sa préservation ou sa conquête. C'est pourquoi, selon les enquêtés, les principales qualités d'un leader politique sont : être intègre (58,96%), les connaissances intellectuelles (49%), être fort de caractère (47,79%) et avoir du souci pour les pauvres (46,49%). D'autres qualités sont moins fréquemment citées : l'expérience nationale d la gestion (33,25%), être un croyant pratiquant (21%) et avoir une expérience internationale dans la gestion (15%). Par rapport aux Institutions de Transition, les citoyens ont majoritairement confiance au Gouvernement d'union nationale. Par contre les opinions sont plutôt mitigées concernant le Président de la République par Intérim et l'Assemblée Nationale. Concernant l'ex-junte, l'opinion de la majorité des enquêtés est qu'elle s'occupe actuellement surtout des questions militaires. L'opinion des Bamakois sur le rôle des acteurs religieux est sans équivoque. La grande majorité des enquêtés (80%) considère que le rôle des acteurs religieux doit être celui de médiateurs entre les acteurs politiques. Une proportion relativement faible (8%) estime que leur rôle doit aussi être celui d'acteurs entiers du jeu politique. Enfin, la même proportion (8%) juge que leur fonction doit être de dispenser des bénédictions pour le pays, faire de l'humanitaire, etc. par contre plus de 71% des personnes enquêtées considèrent la création du Ministère du culte comme très positive. Soumaila GUINDO

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