Victoires décisives contre les djihadistes au Mali

Jan 29, 2013 - 09:06
Jan 29, 2013 - 09:17
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[caption id="attachment_123136" align="aligncenter" width="610"] A Tombouctou, les habitants saluent l'armée française, soulagés après dix mois d'occupation par des islamistes radicaux adeptes de la charia. - Photo Eric Feferberg/AFP[/caption] L'armée française a pris Tombouctou, François Hollande juge la bataille « gagnée ».
La France a gagné une bataille mais n'a pas encore tout à fait gagné la guerre. Les djihadistes semblaient en débandade dans le nord du Mali, après la prise sans combats, hier, de la ville mythique de Tombouctou par les armées française et malienne. Les militants d'Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) et d'Ansar Dine ont fui cette villecarrefour du Sahel, dont ils s'étaient emparés au printemps dernier. Ils ont abandonné des missiles sol-air mais incendié un bâtiment abritant des manuscrits. L'armée française a mené deux opérations « intégrées » sur Tombouctou et Gao, relève-t-on de source militaire, associant forces spéciales, parachutages, renseignement (avions et drônes), raids d'avions Rafale ou Mirage et d'hélicoptères Tigre, colonnes de blindés légers. Cette guerre de dix-huit jours s'est soldée officiellement par un seul mort côté français.
Parallèlement, les djihadistes auraient perdu hier leur principal fief, la ville de Kidal, dans des conditions confuses. Le mouvement touareg laïc du MNLA, allié au printemps dernier à Ansar Dine avant d'être marginalisé, affirmait contrôler cette localité du nord, avec l'appui de djihadistes ayant changé de camp ces derniers jours. Les 3.000 à 6.000 combattants d'Aqmi et d'Ansar Dine vont se réfugier dans les grottes des montagnes alentour, ou s'exfiltrer vers l'Algérie, la Libye, voire la Syrie, estime un connaisseur de la région.
Après avoir estimé que «  nous sommes en train de remporter cette bataille », sans oser encore proclamer la victoire finale, François Hollande a déclaré que la France « n'a pas vocation à rester au Mali » et qu'il appartient aux Africains de prendre le relais. La sécurisation du territoire, pour empêcher le retour des djihadistes mais aussi empêcher des représailles contre des islamistes ou des Touareg, sans compter la libération de cinq otages français, demandera du temps et de l'argent.

Contributions financières

Une conférence des donateurs, aujourd'hui à Addis-Abeba, permettra aux pays occidentaux et arabes de préciser leurs contributions au déploiement d'unités des pays d'Afrique de l'Ouest (Niger, Burkina Faso, Nigeria, Mauritanie, 5.700 soldats) et du Tchad (2.000). Le coût en est estimé à 460 millions de dollars. Tokyo a promis 100 millions et Bruxelles 50 millions. Le FMI a justement annoncé hier le versement de 18,4 millions de dollars au Mali pour la lutte contre « l'instabilité » et pousser les donateurs à reprendre l'aide gelée depuis le coup d'Etat de mars 2012.
Ces contributions rompraient la grande solitude de la France dans cette affaire. Les alliés naturels de la France ont refusé de risquer la vie de leurs soldats et ont fourni une aide logistique symbolique. Peut-être parce qu'ils s'interrogeaient sur les objectifs politico-militaires de Paris, selon Jean-Pierre Maulny, de l'Institut des relations internationales et stratégiques. Le souvenir du départ précipité des troupes françaises d'Afghanistan a pu jouer aussi.
Yves Bourdillon / lesechos.fr
[caption id="attachment_123141" align="alignleft" width="310"] Soldats français devant l’aéroport de Tombouctou, le 28 janvier 2013.
REUTERS[/caption] Tombouctou, le goût de la liberté retrouvée
Scènes de liesse au Mali. Le pays n’en avait pas connues depuis longtemps car il reste soumis à l’état d’urgence. A Tombouctou, dans le Nord, des habitants parlaient, lundi 29 janvier 2013, peu après la libération de la ville, d’une « nouvelle indépendance ». Dès ce mardi matin, la population a commencé à reprendre goût à la vie dans la cité aux 333 saints.
C’est sous un soleil de plomb que l’activité reprend tout doucement, la circulation également. C’est avec le sourire que la population, avec l’aide de l’armée malienne, a commencé à effacer les traces des dix mois d’occupation islamiste, notamment en passant un coup de peinture sur les grands panneaux installés partout en ville. Le premier visé, c’est celui de la police islamique au niveau de la place de l’Indépendance. Dans la foule, un habitant de la ville ne se lasse pas de raconter cette scène : « Ils ont barré une plaque noire où il était écrit "police islamiste" devant le commissariat de la police malienne. Ce matin, l’armée a barré cela et maintenant on attend que l’on y écrive gouvernorat de la sixième région de Tombouctou comme c’était avant. On ne veut même plus voir une de leurs traces dans la ville mystérieuse des 333 saints. Maintenant, le président français devient le 334e saint. » Calmer les esprits Ce mardi, une réunion s’est tenue entre le colonel malien, Keba Sangaré, qui a mené l’opération de reconquête de Tombouctou et le Conseil de crise de la ville, conseil créé au lendemain de l’arrivée des islamistes il y a dix mois. Cette réunion a permis de lister tous les problèmes. A cette occasion, le premier vice-président du Comité de crise a remercié les soldats avant de demander à la population de ne pas chercher à se venger. « Tombouctou libérée, ça représente pour nous quelque chose d’indescriptible car personne ne peut savoir ce que coût dix mois de privation, dix mois d’intolérance, dix mois d’humiliation,explique Diadié Hamadoun Maïga. Notre inquiétude c’était de ne pas voir cette belle victoire réalisée par nos forces armées et leurs alliés français. Nous en appelons maintenant à éviter tout esprit de vengeance ». Sécuriser la ville Les priorités des militaires français et maliens c’est de reconnecter la population de Tombouctou au Mali et au monde en réparant les réseaux de téléphone cellulaire. Mais il faut aussi trouver de l’essence pour la centrale électrique. Il ne reste actuellement que 4 000 litres de carburants en réserve, de quoi tenir 24 heures. Enfin, il faut contrôler tous les bâtiments tenus et habités par jihadistes car les craintes sont grandes. Des armes et des explosifs ont été retrouvés notamment à l’aéroport. « Le premier message que je compte faire passer à la population c’est qu’elle sache que l’armée malienne et l’armée française sont présentes, a déclaré le colonel Keba Sangaré, coordinateur de la région militaire de Tombouctou. Avant l’arrivée des gendarmes, on va essayer de faire la police mais personne ne doit se livrer à des actes de vengeance. Il faut aussi empêcher les enfants de ramasser des objets qu’ils ne connaissent pas, il faut leur dire de ne rien ramasser dans les environs des bâtiments occupés par les jihadistes. » Premières recommandations à la population dans la mesure où déjà, ce mardi matin, il y a eu des réactions de colère et des pillages. Par exemple, un chauffeur de l’un des leaders d’Aqmi a été agressé dans la matinée par une foule en colère qui a pillé sa maison. Récupéré par les militaires maliens, il est désormais en sécurité. La population, qui a souffert si longtemps, s’attaque aux maisons des islamistes, à certains commerces et récupèrent tout (nourriture-meubles-vêtements). Néanmoins, il y a une envie collective d’aller de l’avant, de s’entraider. Le mot liberté est dans toutes les bouches. Par RFI

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