Pour Modibo Sidibé, «la crise au Nord-Mali n’est qu’une partie de la crise malienne»
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- «La multitude de partis reflète la vivacité de la démocratie au Mali mais il est impératif que nous nous unissions autour d’une vision très claire de ce qu’il faut faire pour redresser le pays. Nous sommes dans une situation critique et c’est collectivement que nous devons réfléchir à comment sortir de cette crise. Les problèmes du Mali ne se limitent pas aux problèmes du nord», a déclaré le président des FARE au micro de Sputnik France.
L’argent de la drogue
Bien qu’il n’ait jamais été impliqué dans aucune affaire entachant sa moralité ni son intégrité, cet inspecteur général de police et criminologue de formation a été arrêté trois fois par la junte militaire qui a fait tomber, en mars 1992, le Président Amani Toumani Touré, dont il est très proche. Ce dernier avait dû être exfiltré vers le Sénégal où il a vécu jusqu’en décembre 2019 avant de rentrer, en décembre dernier, chez lui à Mopti, à l’occasion de la célébration des 100 ans de cette ville classée au patrimoine mondial de l’Unesco, mais aujourd’hui désertée par les touristes.- «La vulnérabilité de l’État malien vient de beaucoup plus loin. Elle est structurelle. En ce qui concerne le trafic de drogue au Mali, Amani Toumani Touré, au contraire, a été le premier à mettre en place les instruments majeurs d’une lutte contre ce trafic. Depuis son retour à Mopti, il a dit qu’il voulait aider. Car le plus important, à ce stade, c’est de désamorcer la crise. Amani Toumani Touré n’a jamais parlé de se représenter (à l’élection présidentielle de 2023, ndlr) mais seulement d’aider à la médiation entre les belligérants: il connaît tout le monde dans cette zone, il peut être utile. Nous devons repartir sur un dialogue apaisé pour que la reconstruction soit possible», rétorque Modibo Sidibé.
- «Je dis bien un gouvernement de mission (et pas d’union), car sinon c’est la porte ouverte à un nouveau partage des prédations. Les Maliens ont besoin de pouvoir refaire confiance à leurs dirigeants. Nous ne pourrons recréer cette confiance que dans l’apaisement et dans la réconciliation en dressant une feuille de route claire pour y parvenir», insiste Modibo Sidibé au micro de Sputnik France.
Rétablir l’autorité de l’État
S’il se réjouit que le sommet de Pau qui a réuni, le 13 janvier dernier, les États du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad), à la demande d’Emmanuel Macron, ait permis d’«obtenir des clarifications» et de «lever tous les tabous» concernant le renforcement de l’État malien, il reste encore à ce dernier à rétablir son autorité sur l’ensemble du territoire. Ce qui n’est pas une mince affaire au vu des attaques djihadistes récurrentes et de plus en plus meurtrières, notamment dans la région du Liptako Gourma, dite région des Trois frontières, à la confluence du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Le Président français, qui avait annoncé à l’issue de ce sommet un renfort de 220 soldats, a d’ailleurs décidé de porter à 600 le nombre de troupes supplémentaires allouées à Barkhane pour renforcer les effectifs au Mali, notamment dans cette région, selon un communiqué publié le 2 février dernier par le ministère des Armées. Ce qui va faire passer l’effectif des forces françaises déployées sur le terrain «de 4.500 à 5.100 hommes». Pour sa part, Modibo Sidibé n’en démord pas:- «Soit dit en passant, il y avait déjà une autorité transfrontalière sur le Liptako Gourma, mais elle n’était pas aidée jusqu’à présent et, donc, incapable d’agir. Idem avec le commandement conjoint G5 Sahel/armée malienne sur le fuseau de Sévaré qui est également complètement dépourvu de moyens. Ce qui prouve bien que l’on ne peut pas faire l’économie d’un rétablissement des charges régaliennes et, donc, de l’autorité de l’État sur son territoire si on veut trouver une solution à cette crise», martèle l’ex-Premier ministre.
- «Est-ce vraiment le moment de dire que l’on va négocier quand le GSIM vient de revendiquer l’attentat de Sokolo (qui a fait 19 morts dans les rangs de l’armée malienne, ndlr). Le plus important dans un conflit, c’est de savoir sortir par le haut Or, nous n’en sommes pas encore à ce stade», martèle-t-il
- «La présence de Diocounda Traoré a permis de redonner du sens à la présence de l’État. Depuis le massacre d’Ogossagou, il y a eu mille et une initiatives locales pour désamorcer les affrontements entre communautés. Seules des avancées dans le dialogue national, s’appuyant sur notre histoire, notre République, et des initiatives endogènes de nos forces armées nous permettront de faire durablement cesser les hostilités», estime-t-il.
- «Même si l’État malien a failli sur certains points et qu’il existe, à certains endroits dans le pays, un terreau fertile pour les terroristes, il ne faut pas perdre espoir. La crise au nord n’est qu’une partie de la crise malienne. C’est donc de la responsabilité de la classe politique malienne, comme de celle du Burkina Faso et du Niger, les trois pays les plus touchés par la recrudescence des attaques terroristes après la fusion des groupes djihadistes proches d’Al-Qaïda* en 2017, d’ouvrir de nouvelles perspectives. Et pour cela, il faut qu’un front régional puisse être opposé aux assaillants en impliquant, partout où c’est possible, les populations», préconise Modibo Sidibé.
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