Vers une saignée dans de grandes formations politiques : Des cadres de l'URD et de l'ADEMA dans le viseur des partisans de Modibo Sidibé

Même si, pour le moment, cette information n'a pas encore franchi le cadre de la rumeur, nos interlocuteurs sont formels : dans les jours à venir plusieurs hauts cadres de l'URD de Soumaïla Cissé et de l'ADEMA vont prendre armes et bagages pour le camp de Modibo Sidibé, dont la candidature à la prochaine élection présidentielle se précise de jour en jour.

Toute la journée du vendredi dernier, c'est l'information qui nous a été rapportée par des partisans de Modibo Sidibé, futur candidat à l'élection présidentielle de 2012.

En effet, l'enfant du Wassolou et de Wassala aurait séduit plusieurs hautes personnalités des partis URD et ADEMA qui ont pourtant déjà leur candidat à l'élection présidentielle de 2012. Si une telle information est avérée, cela signifierait que le parti de Soumaïla Cissé, longtemps considéré comme bâti sur un roc d'unité, pourrait être  fortement ébranlé dans les prochains jours, voire dans les mois à venir.

Quant à l'ADEMA, ses cadres et militants s'attendent, depuis l'investiture de Dioncounda Traoré comme candidat du parti, le 30 juillet 2011, à ce qu'il y ait des trahisons de la part des cadres y compris parmi les ex-candidats à la candidature. Surtout que les partisans du candidat potentiel Modibo Sidibé avaient tout entrepris afin que le parti de l'abeille jette son dévolu sur l'enfant du Wassolou pour défendre ses couleurs en 2012. Cela n'ayant pas été possible, ses partisans ne désespèrent pas de voir un parterre de cadres et de simples militants de l'ADEMA et de l'URD notamment rallier le camp de Modibo Sidibé dont la déclaration de candidature aura lieu le 26 novembre 2011, très probablement à Sikasso. Comme pour mieux suivre les traces d'ATT.

Sont cités, comme de potentiels immigrants dans le camp de Modibo Sidibé, des ex-candidats à la candidature de l'ADEMA tels, et en tout premier lieu, le secrétaire général de l'ADEMA, Marimantia Diarra, ex-candidat à la candidature de l'ADEMA et qui n'en est pas à son premier coup d'essai dans la trahison du candidat officiel de son parti. Il y a également des proches du président de la République parmi lesquels Ibrahima N'Diaye, 1er vice-président de l'ADEMA et le très médiatisé ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération internationale, Soumeylou Boubèye Maïga, grand stratège et membre influent du Comité exécutif de l'ADEMA. Ils font tous l'objet de soupçon de vouloir entreprendre "une immigration illégale" dans le camp de Modibo Sidibé qui vient, d'ailleurs, d'être "vu" aux côtés du président de la République, lors de la finale de la Super Coupe d'ATT, à Mopti, le samedi dernier.

On se rappelle que les deux premières personnalités citées ont lâché en 2002, en plein océan et sans gilet de sauvetage, le candidat officiel de leur parti, Soumaïla Cissé, au profit du candidat indépendant Amadou Toumani Touré. Feront-ils de même en 2012 ? C'est, en tout cas, ce que croient penser de nombreux observateurs habitués aux multiples retournements de veste dont seuls les cadres des partis politiques ont le secret. Soumaïla Cissé, le tout fraîchement investi candidat à la présidentielle de 2012, et Dioncounda Traoré, qui a toutes les raisons d'être inquiet à cause de la "politique alimentaire" dont des cadres de son parti se sont longtemps nourris, ont donc de réels motifs d'inquiétude pour maintenir la cohésion et la stabilité dans leurs partis respectifs.    

Salikou surveillé comme du lait sur le feu

Dans le camp de l'URD, les partisans de Modibo Sidibé ont dans leur viseur des cadres et non des moindres dans leur stratégie de conquête du pouvoir. En plus de l'ex-ministre de la Santé, Oumar Ibrahima Touré, presque dégoûté de l'URD pour «cause de non assistance à personne en danger» mais tout de même présent, et cela en dépit de ses démêlées judiciaires, à la Conférence nationale de son parti, il y a le ministre de l'Education, Salikou Sanogo, qui a toujours été considéré dans les cercles de l'URD comme étant devenu ministre par la "seule volonté de l'ex-Premier ministre Modibo Sidibé". Ayant été le tout premier secrétaire général de l'URD, Salikou Sanogo avait été rétrogradé, au 2ème congrès ordinaire de ce parti, en avril 2008, au rang de simple…6ème vice-président.

Le hic est qu'il a été évincé au profit, dit-on, d'un fidèle de Soumaïla Cissé, à savoir Lassana Koné qui ne peut justifier aucun talent en matière d'organisation ni revendiquer une quelconque popularité au sein du parti de la poignée de mains.

De ce fait, durant toutes ces années qu'il est au gouvernail de la gestion quotidienne du parti, son rôle s'est strictement limité à garder seulement la maison en attendant l'arrivée de Soumaïla Cissé, le seul maître à bord, le vrai propriétaire du parti.

Cadre brillant, modeste et discret, Salikou Sanogo a tout donné au parti de la poignée de mains au moment où il n'y avait ni postes à partager ni ces 150-200 millions FCFA que l'URD perçoit annuellement du financement public des partis politiques. C'est pourquoi son éviction du poste de secrétaire général avait été ressentie par moult  militants et sympathisants du parti comme une injustice envers l'un des cadres les plus méritants de l'URD. Même s'il est vrai qu'il est loin d'être seul cadre dans ce cas…Son adjoint à l'époque, Alou Sow, parce qu'il est nommé chef de Cabinet du Premier ministre Modibo Sidibé, avait connu un sort similaire. Il fut sorti du Bureau exécutif national, l'organe dirigeant du parti, et renvoyé dans une obscure commission spécialisée du parti. En guise de protestation, il n'assistera à aucune des réunions de cette commission qui finira, elle aussi, par ne plus l'inviter.

Est-il toujours membre de l'URD ? On le voit en tout cas beaucoup plus aux manifestations des clubs de soutien à Modibo Sidibé que dans les salons feutrés de Soumaïla Cissé dont il était, avant sa disgrâce, l'un des plus fidèles habitués. Ce n'est pas étonnant s'il n'a pas été vu au palais de la Culture à l'investiture de Soumaïla Cissé.   

C'est donc après cette disgrâce que Salikou Sanogo avait été invité au Gouvernement de Modibo Sidibé pour s'occuper du département stratégique qu'est celui de l'Education, de l'Alphabétisation et des Langues nationales. Au grand dam de certains cadres de l'URD qui se prenaient pour beaucoup plus méritants car étant…proches de Soumaïla Cissé, le vrai patron de l'organisation.

Est-ce une trahison si une telle personnalité rangerait demain armes et bagages pour soutenir son bienfaiteur, à savoir l'ex-Premier ministre Modibo Sidibé, tous deux étant, par ailleurs, ressortissants du Wassolou ? Surtout que selon plusieurs observateurs, il est temps que le pouvoir aille maintenant vers le sud. Même si de tels propos peuvent paraître bizarres dans notre pays où le brassage des populations exclut toute appartenance  zonale et à plus forte raison tout régionalisme, la réalité est que certains se battent, selon eux, pour "que pouvoir reste encore au nord". Ce n'est donc pas de la fiction mais de la pure réalité qui est, certes, susceptible de blesser certains esprits qui profitent amplement de cette situation. Tôt ou tard et au rythme actuel, la question de l'appartenance régionale se posera. Elle a même était déjà posée, lors de la conférence de presse, le 12 juin 2011, par une consœur au président de la République qui avait alors répondu que la question relative au régionalisme était "une question banale, mais profonde". Dans sa rediffusion in extenso, l'ORTM avait censuré ce passage comme l'on devait s'y attendre. Ce qui n'enlève pourtant rien à la pertinence de la question.

En tout cas, une chose est sure : une éventuelle candidature de Modibo Sidibé provoquera inévitablement des remous au niveau des organes dirigeants des grandes formations politiques où l'homme a déjà ses pions (le mot n'est pas péjoratif) qui seront prêts à lâcher, au moment opportun, un Soumaïla Cissé ou un Dioncounda Traoré.

D'ailleurs, selon les partisans de l'enfant du Wassolou, c'est aujourd'hui la ruée nocturne des cadres URD et ADEMA pour aller s'inscrire dans le camp de Modibo Sidibé. Vrai ou faux ? Seul le temps en dira plus.

Mamadou FOFANA