En s'opposant, pour le moment, à une intervention militaire internationale au Mali pour faire dégager les bandits armés et autres djihadistes qui occupent les trois régions du nord (Tombouctou, Gao et Kidal) à la faveur du coup d'Etat du 22 mars 2012, le Premier ministre Cheick Modibo Diarra veut se maintenir aux affaires, chose à laquelle il ne pouvait prétendre qu’à la faveur des circonstances exceptionnelles que vit le Mali. Car, tant que le nord reste occupé par des assaillants avec comme corollaire les abus et les exactions de toutes sortes pratiqués sur les paisibles populations, il n'y aura point d'élection. Le plan de l’ex-navigateur interplanétaire de la NASA est suicidaire parce que les assaillants du nord, dans la quête du survie à laquelle ils sont confrontés pourraient facilement reconquérir le sud. Et, ce n'est pas l'armée malienne en pleine déconfiture, qui pourrait les en empêcher.
[caption id="attachment_71409" align="alignleft" width="300" caption="Cheick Oumar Diarra, Premier ministre du Mali"]
![](http://www.maliweb.net/wp-content/news/images/2012/06/Cheick-Modibo.jpg)
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Le bout du tunnel est encore loin pour les Maliens, surtout pour ceux du nord qui vivent jusqu'à présent dans des conditions très difficiles à cause de l’invasion des bandits armés qui a coupé le Mali en deux à la faveur du coup d'Etat du 22 mars 2012. Et pour cause : le Conseil de Sécurité des Nations Unies vient de conditionner son appui logistique, humain et financier, à une demande expresse des autorités de Bamako. Celles-ci, sous la férule du Premier ministre, Cheick Modibo Diarra, ne sont pas, pour l'instant, favorables à une intervention militaire afin de libérer le nord qui se trouve entre les mains des islamistes et autres djihadistes.
Le chef du gouvernement souffle le chaud et le froid. Dans une formule qui lui est propre, il affirme tantôt qu'il
"ne veut pas d'une guerre qui fera de l'enfant un orphelin, de la femme, une veuve". Tantôt, il se déclare pour "
une guerre qui met fin à la guerre, une guerre qui instaure le développement". Malgré tout, l’ex-navigateur interplanétaire de la NASA ne pose aucun acte concret allant dans le sens de l'une ou l'autre option. La libération du nord afin de mettre un terme à la souffrance de nos concitoyens de Tombouctou, Gao et Kidal ne semble pas être, en tout cas pour l'instant, la préoccupation de Cheick Modibo Diarra, le Premier ministre "
de pleins pouvoirs" et président de la transition par intérim, le titulaire de ce poste étant momentanément empêché à la suite d’une tentative d’assassinat dans son palais par des individus malintentionnés. Avant d'aller à Paris où il est présentement en convalescence, le président Dioncounda Traoré a délégué, Constitution oblige, ses pouvoirs au Premier ministre.
Au lieu d'utiliser ces pouvoirs à bon escient, Cheick Modibo Diarra se complait dans la restauration comme s'il était en mission de ceux qui veulent prendre leur revanche sur l'histoire. Aussi, on assiste-t-on à des nominations des vieux chevaux de retour au sein de la "
Famille Moussa et Intime (FMI)", du nom de son beau-père, l'ancien ditacteur Moussa Traoré qui a gouverné le Mali d'une poigne d’acier durant 23 ans. Ce dernier, revêtu du manteau de consultant en rend, dit-on enRussie et en Chine pour négocier des armes afin de combattre les groupes armés qui occupent le nord. Mais sa comme mission secrète consisterait à convaincre ces deux pays membres du Conseil de Sécurité des Nations-Unies à ne pas voter en faveur de l'envoi d'une force militaire internationale au Mali.
Pourquoi s'oppose-t-on à une intervention militaire internationale pour libérer les trois régions du nord (Tombouctou, Gao et Kidal) tombées entre les mains des djihadistes et autres islamistes dans la mesure où l'armée malienne, si elle existe encore, est incapable de reconquérir un centimètre du territoire national ? Voilà une question à laquelle personne ne trouverait une réponse crédible.
En réalité, l’ex-navigateur interplanétaire de la NASA, Cheick Modibo Diarra joue au dilatoire pour rester aux affaires le plus longtemps possible sachant pertinemment que si ce n'était pas la situation exceptionnelle que vit le Mali, il n’avait aucune chance de se hisser au sommet de l'Etat. Etant donné son statut de politicien de la 25ème heure.
Ainsi, aussi longtemps que l'occupation du nord par des bandits armés va durer, il n'y aura point d'élection, ce qui fait "
le bonheur" (sic) de Cheick Modibo Diarra.
Vers une avancée des bandits armés au sud
S'il n'y a pas une intervention militaire internationale, le plus vite possible, pour libérer le nord, nous allons assister impuissamment à l'avancée des bandits armés et des djihadistes vers le sud. Isolés, incapables de s’assurer le minimum vital et face à la crainte de ne pouvoir contenir la colère des population, les bandits armés vont progresser vers le sud. Personne ne pourra empêcher cette progression, surtout pas l'armée malienne en déconfiture, qui n'existe que de nom. Car, ils ne sont plus nombreux au sein de nos forces de l'ordre et de sécurité ceux qui sont disposés à respecter leur serment de défendre l'intégrité du territoire national et d’assurer la protection des personnes et de leurs biens. D'où la grave crise de confiance entre l'armée et son peuple.
Avec la débandade de nos militaires devant l'ennemi, laissant derrière eux armes et munitions, ceux-ci ont prouvé aux yeux du monde qu'ils ne sont pas prêts à mourir pour la patrie, un serment qu'ils ont pourtant fait en s'engageant dans l'armée. C'est pourquoi, la semaine dernière, un groupe de militaires a assiégé les locaux de la télévision panafricaine à Bamako, Africable, afin d'empêcher la diffusion d'une interview qu'un membre du MNLA (mouvement national pour la libération de l'azawad) a accordée à notre audacieux confrère Abdoulaye Barry. Selon certaines indiscrétions, l'interview en question renfermerait des informations qui mettent à nu les militaires maliens, leur fuite, pardon leur «
repli stratégique et tactique».
A ce propos, voici un point de vue d'un des rares vaillants militaires du camp Cheickou Amadou Tall de Ségou appelé aussi la zone de défense n°2. "
Je ne comprends pas le repli stratégique et tactique du commandement. Etant au front vers Léré, il nous demande de nous replier sur Diabaly. Quand l'ennemi va venir là-bas, il va nous demander de nous replier sur Niono, ensuite ça sera Ségou, Bamako, puis le Sénégal après Kayes, ou la Guinée après Bamako. C'est ainsi que l'ennemi va prendre le pays" dit-il au cours d'une causerie dans un salon feutré à Ségou.
L'histoire donne déjà raison à ATT
En réalité, le manque d'armement pour aller se battre au nord contre les bandits armés et les djihadistes n'a jamais été le mobile réel du coup d'Etat du 22 mars 2012. L'actuel ministre de la Défense, le Colonel-major Yamoussa Camara, celui-là qui doit son grade au chef des putschistes, n'a-t-il pas déclaré, le samedi 2 juin dernier lors de la visite du Premier ministre, Cheick Modibo Diarra, au camp de Ségou que "
le gouvernement du Mali a commandé des armements qui sont en voie d'acheminement depuis cinq mois", donc bien avant le coup d'Etat. Mieux, le même ministre de la Défense a soutenu dans le même discours que "
le Mali manque de fonds pour l'achat des équipements militaires qui coûtent chers et que le pays est très vaste, donc difficile à contrôler". Une manière de dire que les autorités ont la volonté d'équiper l'armée, mais qu'elles manquent de moyens. Dans ce cas, y avait-il la moindre raison de faire un coup d'Etat dans la mesure où l’Union africaine avait décidé, à Bamako, le lundi 19 mars 2012, de venir en aide au Mali ? Ce coup d’Etat n’a donc pas été fait dans l'intérêt national, mais bien personnel. De nombreuses sources s’accordent là-dessus : les évènements du 22 mars 2012 n'étaient ni plus ni moins qu'un règlement de compte au sein de l'armée entre les subalternes et la hiérarchie militaire.
Les premiers croupissaient sous le poids de la pauvreté, les seconds menaient la vie à grand train. Ainsi, pour les premiers, le président ATT était responsable de leur misère. D'où la mutinerie qui s'est transformée en coup d'Etat, le 22 mars 2012, faute de négociation. Certains officiers supérieurs s'étant interposés entre les mutins et le président de la République dans le but secret de récupérer le coup d'Etat.
Tout compte fait, aujourd'hui, l'histoire donne déjà raison à ATT qui avait plaidé pour une synergie d'actions des pays de la sous-région pour faire face aux bandits armés appuyés par des djihadistes de tout acabit. Il avait également plaidé afin qu'on ne fasse pas d'amalgame dans la lutte contre l'ennemi. Quelques semaines seulement après le coup d'Etat du 22 mars 2012, le Capitaine Amadou Haya Sanogo qui, en réalité, a été parachuté comme le chef de la junte par les sous-officiers, s'est rendu compte de la dure réalité de la gestion de la question du nord. Il a crié sur tous les toits pour demander de l'aide, mais sans succès. Car l'autorité qu'il s'est octroyée n'ayant pas été reconnue par la communauté internationale qui a qualifié son coup d'Etat «
d'inutile et ignoble sans comparaison aucune dans l'histoire de l'humanité». Car le Mali était, jusqu'à la date du 22 mars 2012, un exemple de démocratie résolument engagé dans la voie du développement.
Comme le président ATT, la junte a demandé de l'aide à la communauté internationale pour faire face à la crise du nord. Comme ATT, elle a exhorté la population malienne à ne pas faire d'amalgame dans le combat contre l'ennemi. Comme ATT, le gouvernement de transition a sollicité de l'aide à la communauté internationale pour faire face aux bandits armés et a également supplié à la population malienne à ne pas faire d'amalgame dans le combat contre l'ennemi. Que reste-t-il à faire pour des putschistes qui continuent de diriger en réalité le pays avec la complicité d’un gouvernement à sa totale dévotion? Présenter des excuses au président ATT et au peuple malien.
A ATT pour l'avoir chassé du pouvoir qu'il a conquis à travers les urnes, donc de façon démocratique, et qui n’a pas voulu engager un bras de fer avec les mutins pour épargner des vies humaines. C’est pourquoi il a soutenu, au plus fort moment de la mutinerie, qu’avec lui, «
un militaire malien ne tirera jamais sur un autre». D’où son retrait volontaire du pouvoir quand bien même la CEDEAO a voulu le rétablir dans ses fonctions de président de la République comme ce fut le cas en Sierra Leonne avec le président Tedjan Kabba.
Au peuple malien pour tous les malheurs que nous connaissons aujourd'hui à savoir l'occupation des trois régions du nord (Tombouctou, Gao et Kidal) tombées entre les mains des bandits armés en trois jours après le coup d'Etat du 22 mars 2012 et les affres de la vie quotidienne.
La conséquence est désastreuse car le pays vit au ralenti, l'économie est presque en ruine avec la faible mobilisation des ressources internes et le tarissement des financements de l'extérieur. Dans le premier cas, selon le ministre de l'Economie et des finances,
"l'Etat est à 600 milliards de FCFA de perte et le taux de croissance a chuté de 6% à - 1,2%". Que dire du second cas, le tarissement des financements extérieurs?
En plus, nos concitoyens du nord vivent dans des conditions inhumaines , confrontés à la faim, aux vols, aux pillages, aux viols, aux sévices corporels et à la privation des libertés. Pendant ce temps, le pouvoir militaire continue de régner en maitre absolu à Bamako et cela, malgré le retour à l'ordre constitutionnel.
Le pouvoir de Kati (quartier général de la junte) continue de sévir avec ses arrestations arbitraires : le dernier cas est celui de l'opérateur économique Hamadoun N'Daou dit Afourou, un proche de l'ancien président ATT. S'y ajoutent des tentatives de séquestration d'autres personnalités comme le Directeur général des Douanes, Modibo Maïga, le PDG de GDCM (Grand Distributeur de Céréales au Mali) et de MMM (Moulin Moderne du Mali), le richissime Modibo Kéïta. Avec le coup d'Etat du 22 mars 2012, c’est désormais le sauve qui peut. Si bien que même les alliés d'hier d'ATT sont devenus ses détracteurs afin de bénéficier de l’indulgence des nouveaux maître en treillis et bérets verts.
Aujourd'hui, au regard de tous les abus et exactions qui se passent au Mali, l'on est en droit de se poser la question de savoir quelle est l’utilité du gouvernement de Cheick Modibo Diarra ? Que fait-il de ses "
pleins pouvoirs" ? Si ce n'est imposer une journaliste de la télévision nationale pour la couverture de son périple en Algérie, France, Mauritanie et Niger. En réalité, le supposé descendant de N'Golo Diarra, puissant roi bambara de Ségou, manque cruellement d'autorité face à la junte militaire. Il doit prendre son courage à deux mains, comme tout bon Diarra, afin de donner un contenu à ses
"pleins pouvoirs", si réellement «pleins pouvoirs il y a, afin de libérer le pays de l’empire de l’organisation sans visage basée à Kati.
C'est à ce seul prix qu'il pourra rendre son gouvernement crédible et bénéficier de l'aide de la communauté internationale pour sortir le Mali de l'impasse. Faute de quoi, la formation d'une nouvelle équipe gouvernementale s'impose. Toute chose qui va mettre davantage le Mali en retard dans le recouvrement de son intégrité territoriale.
Alassane DIARRA